erce, sa garde favorite.
Pendant ce temps, Porthos, agenouille derriere son cheval, qui
trepignait dans les convulsions de l'agonie, tenait un pistolet
dans chaque main.
Cependant le combat etait commence entre d'Artagnan et son
adversaire. D'Artagnan l'avait attaque rudement, selon sa coutume;
mais cette fois il avait rencontre un jeu et un poignet qui le
firent reflechir. Deux fois ramene en quatre, d'Artagnan fit un
pas en arriere; son adversaire ne bougea point; d'Artagnan revint
et engagea de nouveau l'epee en tierce.
Deux ou trois coups furent portes de part et d'autre sans
resultat, les etincelles jaillissaient par gerbes des epees.
Enfin, d'Artagnan pensa que c'etait le moment d'utiliser sa feinte
favorite; il l'amena fort habilement, l'executa avec la rapidite
de l'eclair, et porta le coup avec une vigueur qu'il croyait
irresistible.
Le coup fut pare.
-- Mordious! s'ecria-t-il avec son accent gascon.
A cette exclamation, son adversaire bondit en arriere, et,
penchant sa tete decouverte, il s'efforca de distinguer a travers
les tenebres le visage de d'Artagnan.
Quant a d'Artagnan, craignant une feinte, il se tenait sur la
defensive.
-- Prenez garde, dit Porthos a son adversaire, j'ai encore mes
deux pistolets charges.
-- Raison de plus pour que vous tiriez le premier, repondit celui-
ci.
Porthos tira: un eclair illumina le champ de bataille.
A cette lueur, les deux autres combattants jeterent chacun un cri.
-- Athos! dit d'Artagnan.
-- D'Artagnan! dit Athos.
Athos leva son epee, d'Artagnan baissa la sienne.
-- Aramis! cria Athos, ne tirez pas.
-- Ah! ah! c'est vous, Aramis? dit Porthos.
Et il jeta son pistolet.
Aramis repoussa le sien dans ses fontes et remit son epee au
fourreau.
-- Mon fils! dit Athos en tendant la main a d'Artagnan.
C'etait le nom qu'il lui donnait autrefois dans ses moments de
tendresse.
-- Athos, dit d'Artagnan en se tordant les mains, vous le defendez
donc? Et moi qui avais jure de le ramener mort ou vif! Ah! je suis
deshonore.
-- Tuez-moi, dit Athos en decouvrant sa poitrine, si votre honneur
a besoin de ma mort.
-- Oh! malheur a moi! malheur a moi! s'ecriait d'Artagnan, il n'y
avait qu'un homme au monde qui pouvait m'arreter, et il faut que
la fatalite mette cet homme sur mon chemin! Ah! que dirai-je au
cardinal?
-- Vous lui direz, monsieur, repondit une voix qui dominait le
champ de bataille, qu'il avait envoye contre moi le
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