te, et l'on arrivait en
face de la vieille basilique, dans laquelle on disait une premiere
messe.
-- Mettons pied a terre, Raoul, dit Athos. Vous, Olivain, gardez
nos chevaux et me donnez l'epee.
Athos prit a la main l'epee que lui tendait le laquais, et les
deux gentilshommes entrerent dans l'eglise.
Athos presenta de l'eau benite a Raoul. Il y a dans certains
coeurs de pere un peu de cet amour prevenant qu'un amant a pour sa
maitresse.
Le jeune homme toucha la main d'Athos, salua et se signa. Athos
dit un mot a l'un des gardiens, qui s'inclina et marcha dans la
direction des caveaux.
-- Venez, Raoul, dit Athos, et suivons cet homme.
Le gardien ouvrit la grille des tombes royales et se tint sur la
haute marche, tandis qu'Athos et Raoul descendaient. Les
profondeurs de l'escalier sepulcral etaient eclairees par une
lampe d'argent brulant sur la derniere marche, et juste au-dessous
de cette lampe reposait, enveloppe d'un large manteau de velours
violet seme de fleurs de lis d'or, un catafalque soutenu par des
chevalets de chene.
Le jeune homme, prepare a cette situation par l'etat de son propre
coeur plein de tristesse, par la majeste de l'eglise qu'il avait
traversee, etait descendu d'un pas lent et solennel, et se tenait
debout et la tete decouverte devant cette depouille mortelle du
dernier roi, qui ne devait aller rejoindre ses aieux que lorsque
son successeur viendrait le rejoindre lui-meme, et qui semblait
demeurer la pour dire a l'orgueil humain, parfois si facile a
s'exalter sur le trone:
-- Poussiere terrestre, je t'attends!
Il se fit un instant de silence.
Puis Athos leva la main, et designant du doigt le cercueil:
-- Cette sepulture incertaine, dit-il, est celle d'un homme faible
et sans grandeur, et qui eut cependant un regne plein d'immenses
evenements; c'est qu'au-dessus de ce roi veillait l'esprit d'un
autre homme, comme cette lampe veille au-dessus de ce cercueil et
l'eclaire. Celui-la, c'etait le roi reel, Raoul; l'autre n'etait
qu'un fantome dans lequel il mettait son ame. Et cependant, tant
est puissante la majeste monarchique chez nous, cet homme n'a pas
meme l'honneur d'une tombe aux pieds de celui pour la gloire
duquel il a use sa vie, car cet homme, Raoul, souvenez-vous de
cette chose, s'il a fait ce roi petit, il a fait la royaute
grande, et il y a deux choses enfermees au palais du Louvre: le
roi, qui meurt, et la royaute qui ne meurt pas. Ce regne est
passe, Raoul; c
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