e race, mais seulement de profession.
Fellah signifie paysan. Le paysan de la vallee du Nil descend de la
race egyptienne primitive. Nous verrons ses ancetres sur les parois
du tombeau de Ti, architecte a Memphis sous une des premieres
dynasties, qui dort au seuil du desert lybique, pres des pyramides
de Saqqarah, depuis pres de six mille ans.
Des restes de couleur sont encore accroches aux figures en relief,
dont le temps a respecte l'elegant dessin et le groupement
harmonieux. Des femmes soutiennent, de leurs bras arrondis, des
corbeilles posees sur leurs tetes. Des paysans fauchent et battent
le ble. Memes visages, memes instruments agricoles que ceux de
l'Egypte actuelle.
Ces petits anes, robustes, elegants et fins, qui trottinent pour
notre amusement dans la plaine du Delta, le long des canaux ou
bombent des voiles blanches, nous les reverrons aussi dans les
tombeaux de Saqqarah, ou ils defilent, depuis six mille ans, devant
l'effigie du maitre, grand proprietaire ou fonctionnaire de la Cour.
Nous les monterons dans la Haute Egypte, quand nous galoperons a
travers la plaine, peuplee de travailleurs et couverte de moissons,
vers les ruines et les tombeaux de la vallee des Rois. Ce n'est pas
une des moindres merveilles de ce pays merveilleux que cette
identite de la race et de la vie d'a present avec la race et la vie
ressuscitee apres soixante siecles.
Race admirable, puisqu'elle a resiste au corrosif de l'Islam. On
sait que les Arabes convertirent de force, au VIIe siecle de notre
ere, les paysans egyptiens, chretiens depuis le deuxieme. Ils sont
beaux, laborieux, prolifiques et sales. Vraisemblablement, l'Egypte
aura, dans un demi-siecle, vingt millions d'habitants. Le coton de
la Basse Egypte est hors prix: cinquante francs le cantar (45
kilogrammes) en 1895; cent francs ou a peu pres, l'annee derniere.
Les fellahs s'enrichissent. Il y a quelques semaines, un vieux
paysan paya 500,000 francs, rubis sur l'ongle, a une societe belge,
des terres qu'il venait d'acquerir. A le juger sur sa mine, sa
crasse et ses haillons, on lui aurait donne l'aumone! La crise
financiere, qui a fait tant de ravages dans les grandes villes,
parmi les colonies europeennes surtout, n'a pas atteint les ruraux.
Dans toute l'Egypte, la valeur et le loyer de la terre augmentent
tous les jours. Il faut sans cesse de nouvelles terres cultivables a
une population qui ne cesse de s'accroitre.
Il n'y a pas au monde de cultivateur plus l
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