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Syriens, tres nombreux dans la Basse Egypte, sont catholiques. Les
Armeniens et les Grecs appartiennent presque tous a l'eglise
schismatique. On voit que, dans cette mosaique de races et de
religions, aucune couleur, aucune nuance ne manque.
Ce peuple, le plus ancien du monde, et qui forme un assemblage
unique au monde de races, de civilisations, de religions melees ou
superposees, comment supporte-t-il la domination et la main de
l'Angleterre? Y a-t-il une "ame egyptienne"? Si elle existe,
a-t-elle des regrets, des desirs, des esperances? J'ai pris des
informations sur tout cela, et a bonne source. Je raconterai ce
qu'on m'a dit, ni plus ni moins.
Les Anglais sont craints, respectes meme; mais on ne les aime pas:
telle est, a l'endroit des maitres actuels de l'Egypte, l'opinion
generale des milieux europeens et de l'elite indigene. Ils ont
retabli l'ordre en Egypte, et ils le maintiennent. Si le paysan est
delivre de la sequelle des beys et des pachas qui l'exploitaient, au
gre de leurs besoins ou de leurs appetits, a la facon dont les
mandarins exploitent les paysans chinois, c'est aux Anglais qu'il le
doit. Avant l'occupation, l'impot etait arbitraire. Le khedive
demandait autant a tel district; pachas et beys faisaient rentrer la
somme, majoree d'un "honnete" benefice. Ces abus ne sont plus qu'un
souvenir.
La securite regne, avec l'ordre, dans tout le pays. Toutes les rues,
toutes les ruelles du Caire, a toutes les heures du jour et de la
nuit, sont parfaitement sures. La police egyptienne, commandee par
des officiers anglais, ne badine pas avec les delinquants. Les
"chawichs"--c'est le nom des policemen--ont la main legere et le
nerf de boeuf prompt. Ils apaisent souvent les disputes dont on les
fait juges en distribuant autant de coups de pied aux demandeurs
qu'aux defendeurs. Gare aux badauds qui n'obtemperent pas assez vite
au commandement de circuler. La police du Caire leur inculque
l'obeissance et le respect--je l'ai vu--a coups de pied et a coups
de baton. Des agents montes, Anglais ou Ecossais, geants superbes,
tunique rouge et casquette plate, renforcent et surveillent la
police ordinaire. Des qu'on voit poindre leur silhouette, le soir,
dans les quartiers populaires, et qu'on entend le sabot de leurs
chevaux, betes imposantes et pleines de feu, les bons se rassurent
et les mechants tremblent ... Le respect et la crainte chevauchent,
en croupe, avec eux.
C'est encore a l'Angleterre qu'il faut
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