upait encore, a tous les points de vue, le
premier rang. Elle controlait officiellement, au nom de l'Europe, de
compte a demi avec l'Angleterre, le gouvernement egyptien. Egale en
droit de sa rivale seculaire, elle avait, en fait, le pas sur elle.
Comment elle perdit cette enviable primaute? Le fait est encore dans
toutes les memoires. En 1882, au lendemain de la revolte d'Arabi
pacha et du massacre d'Alexandrie, ou plusieurs residents etrangers
furent assassines par la populace, une intrigue victorieuse de M.
Clemenceau l'empecha de participer a la repression necessaire.
L'Angleterre, ayant ete seule a la peine, recueillit tout le profit
de son effort. L'accord anglo-francais, qui valut a la France, il y
a quelques annees, le redoutable cadeau du Maroc, abolit ce qui
pouvait lui rester de droits traditionnels.
Son influence, depuis lors, n'a cesse de decroitre. En depit de
l'entente cordiale, le gouvernement anglo-egyptien pensionne, des
qu'il le peut, quelquefois avant l'age, les fonctionnaires francais,
remplaces incontinent par des anglais. Ses commercants ne brillent
pas en general par l'initiative. Les notres sont plus connus, plus
laborieux, plus estimes et reussissent davantage. Il lui reste, il
est vrai, ses missionnaires, Jesuites et Freres des ecoles
chretiennes, ses savants et ses journalistes.
De ceux-ci, j'aime mieux ne pas dire grand'chose. Ils nous ont
gentiment invites a diner. Puis, ce n'est peut-etre pas leur faute
si les journaux egyptiens de langue francaise ont, au Caire, une si
deplorable reputation. Quelques-uns de ces journaux sont rediges en
francais de Saint-Domingue ou de Haiti. Un au moins, asservi a une
loge meprisee, honore le clerge et la foi catholiques des plus
basses injures. Avant de le lire, je croyais que les orateurs de nos
congres de Libre Pensee etaient sans rivaux dans ce genre. Je
croyais leur pompon sans egal. Mais il a fallu se rendre a
l'evidence, jamais ils ne parleront dans ce style des "sbires de
l'Inquisition" et des "esclaves de Rome". Dans quelques autres, on
fait un plus frequent emploi de l'escopette que de la plume. "Payez,
et vous serez consideres ..." Ce ne sont pas ces vengeurs qui
rendront jamais l'Egypte a la France.
Les egyptologues francais sont incomparables. De son ancienne
parure, il ne lui reste que ces joyaux, mais ils sont en or fin.
Mariette, mort a la tache, commenca, avec d'autres, la glorieuse
lignee. M. Maspero jouit aujourd'hui d'une autori
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