ches d'or
et pleines de chansons! Pas un oiseau. Entre les troncs nus et
clairsemes, qui dressent dans la lumiere crue la dentelure de leurs
panaches, trois cavaliers pourraient passer de front. Nous piquons
droit sur une pyramide dont les degres escaladent l'azur. Ici fut
Memphis. Des vagues de poussiere roulent sur sa necropole, vieille
de six mille ans.
Dans un livre loue par la critique allemande et dont M. Maspero
parlait l'autre jour avec tendresse, M. Capart a decrit _Une rue de
tombeaux a Saqqarah_. Une rue! Et il y en a des milliers. C'est
Pompei elevee a la cinquantieme puissance. Pendant quarante siecles,
on y batit pour les morts des maisons meublees, pourvues et decorees
comme pour l'agrement et l'usage des vivants. L'immense ville
souterraine deroule a l'infini l'echeveau de ses avenues bordees de
demeures funeraires; l'Egypte des premieres dynasties y etale les
scenes rustiques de sa vie pastorale. Les pyramides ont pousse a la
surface, comme des montagnes projetees vers le ciel par une eruption
volcanique. Elles jalonnent en ligne droite, sur une file de trente
lieues, la frontiere du desert. Ce sont des tombes aussi, des tombes
royales, posterieures aux tombes souterraines, dont notre Musee du
Cinquantenaire, grace a la generosite de M. le baron Empain, possede
un interessant specimen.
Entre les pyramides de Saqqarah et celles de Gizeh, les plus
grandes de toute l'Egypte, trois lieues de desert. Souleves par un
aigre vent du Nord, d'aveuglants tourbillons etendaient sur la route
une molle croute sablonneuse qui se brisait sous la foulee de nos
montures. Quatre heures penibles. La "terre promise", au loin, se
montrait a nos yeux. Nous nous guidions sur le triangle de Cheops,
pose comme un joujou a la limite de l'horizon et qui grandissait
insensiblement devant nous d'une lente et solennelle ascension.
Chephren, Mycerinus, et six autres, qui ont l'air de jeunes faons
disperses autour d'une girafe, composent avec Cheops, dont l'arete
mesure deux cent dix-sept metres, le groupe de Gizeh. Le Sphinx, un
peu en avant, sa fiere tete songeuse tournee vers l'Orient, fait
sentinelle pres des ruines de son temple.
Deux mers viennent mourir au pied de leurs assises formidables: la
mer blonde et sans cesse agitee des sables infinis, et la mer riante
des vertes cultures ou la route du Caire enfonce un blanc sillon.
Sans la canaille dont les savants assauts, combines comme les
manoeuvres d'une armee en bataille
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