s,
c'est que six semaines auparavant le collier avait ete remis aux
bijoutiers Marche et Chabert pour une reparation au fermoir, et que par
consequent il semblait raisonnable d'admettre qu'a ce moment toutes les
perles etaient vraies, sans quoi ces bijoutiers n'auraient pas manque
de signaler celles qui etaient fausses--leur responsabilite se trouvant
engagee.
Etait-il possible que l'ouvrier charge de la reparation eut substitue
une ou plusieurs perles fausses aux vraies qu'il aurait detournees? Il
se le demandait, mais sans croire beaucoup a cette explication.
Cependant, comme cela n'etait ni invraisemblable ni impossible, le
plus sage etait de ne pas lacher la bride a l'imagination, sans avoir
prealablement fait une enquete de ce cote.
Le lendemain matin, avant le dejeuner, il se rendit chez les bijoutiers,
et il les trouva tous les deux dans leur magasin, surveillant
l'ouverture des caisses dans lesquelles les commis prenaient les bijoux
qu'on devait mettre en montre ce jour-la.
Il passait rue de la Paix par hasard et, se trouvant devant le magasin,
il etait entre pour payer la reparation du collier de perles de madame
d'Unieres.
--Madame la comtesse a paye elle-meme cette reparation.
Il le savait, mais il n'avait pas trouve d'autre pretexte que celui-la
qui lui permit de parler du collier.
--Il va bien, le collier? dit-il d'un air indifferent.
Les deux associes se regarderent.
--J'entends, continua le comte, que les perles sont toujours en bon
etat?
--Mais, sans doute.
--Est-ce que les perles ne sont pas sujettes a des maladies et ne
perdent pas leur beaute en vieillissant?
--Elles meurent; mais celles de madame la comtesse d'Unieres n'en sont
pas la, il s'en faut; jamais elles n'ont ete plus belles. Quand la
reparation a ete faite, nous avons laisse le collier dans son ecrin
ouvert, sur cette table, et elles ont fait l'admiration de toutes nos
clientes qui les ont vues. Je suis sur que madame la comtesse d'Unieres
exposerait son collier au profit d'une oeuvre de charite, qu'a lui seul
il ferait recette.
--Vous croyez?
--Incontestablement. Sans doute il y a des perles plus grosses; mais
pour mon compte, je n'en connais pas une reunion plus parfaite; quatre
cents perles pareilles sans qu'une seule soit inferieure aux autres,
cela ne se voit pas tous les jours; je les ai regardees moi-meme une a
une avant de renvoyer le collier, et pour un homme du metier c'etait une
jouissance.
Ai
|