nua le notaire, que cette petite fille avait ete
instituee legataire universelle d'une belle fortune. La personne qui a
fait ce legs est le comte de Chambrais, et le comte de Chambrais avait
pour niece madame la comtesse d'Unieres, la femme du depute.
--Qui s'est trouvee desheritee.
--Precisement. M. de Chambrais etait-il ou n'etait-il pas le pere de
cette enfant qu'on veut reconnaitre aujourd'hui? C'est un secret qu'il a
emporte dans la tombe. Et si les probabilites sont pour l'affirmative,
je reconnais que nous n'avons que des probabilites. Cependant elles
reposent sur un fait a mon sens considerable: madame d'Unieres, seule
heritiere legitime de son oncle, se trouvant exheredee par le testament
dont j'ai parle, s'est chargee de la surveillance et de l'education de
l'enfant, ayant pour elle des soins et une tendresse vraiment maternels.
Il y aurait la un esprit d'abnegation si extraordinaire, qu'il est plus
logique d'admettre que si elle a en quelque sorte adopte cette enfant,
c'est qu'elle connaissait les liens qui l'attachaient a M. de Chambrais.
Eh bien! c'est madame d'Unieres, c'est M. d'Unieres que le chantage
menace. S'appuyant sur ses soins, mais sans rien produire en plus, ni
acte de naissance, ni commencement de preuves par ecrit, cet aventurier
pretend que madame d'Unieres serait la mere de cette enfant qu'elle
aurait eu avant son mariage. Et cette pretention, il ne veut pas, vous
pensez bien, la faire consacrer par un tribunal, mais il compte s'en
servir pour extorquer le plus qu'il pourra au comte et a la comtesse par
la menace d'un proces scandaleux.
Le notaire fit une pause, et la physionomie du prefet lui dit que les
dispositions auxquelles il s'etait tout d'abord heurte se modifiaient.
--C'est pour un adversaire politique que je reclame votre protection,
monsieur le prefet, et c'est un titre qui, me semble-t-il, doit vous
toucher.
Le prefet eut un sourire disant clairement que les titres de ce genre
n'avaient jamais ete en faveur dans la maison.
--Et je dois ajouter, continua le notaire, que, s'il ne vient pas
lui-meme la reclamer, c'est qu'il ignore encore le danger dont son
honneur est menace. J'en ai ete le premier informe par une demarche de
notre personnage qui va a elle seule vous le faire connaitre: sachant
que j'etais le notaire de l'enfant ainsi que de M. et madame d'Unieres,
il est venu me demander de dresser l'acte de reconnaissance, non pour
que je le dresse reellement, mais pou
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