'avait pas encore paru, je partais, vous avez eu
la bonte de courir pour me le rapporter tel quel. Ces ouvrages bien
faits sont precieux, non seulement pour voyager, mais aussi pour
consulter a toute heure, et vous faites la un travail des plus utiles
et des plus interessants dont, pour ma part, je vous sais le plus grand
gre. Si, pour le Berry, la Creuse et le Bourbonnais, je peux vous
renseigner et vous piloter, je serai bien contente de vous apporter mon
grain de sable. Tout a vous de coeur.
GEORGE SAND.
Vos _Histoires de l'art_ sont admirablement bien faites; voila une chose
qui manquait! ne craignez pas d'etendre, un peu, quand vous y etes, la
partie geologique, mineralogique, botanique, etc. Cela interesse meme
ceux qui ne sont pas savants, et leur apprend a observer.
CDVIII
A M. CALAMATTA, A BRUXELLES
Nohant, 6 avril 1857.
Tu ne sais pas ce que tu dis avec ton Colisee, ta forme, ton grand
peuple et ton cri de vengeance que l'on doit crier sur les toits. Je te
passe ton gout d'artiste, c'est ton droit, et je ne dispute pas avec
ceux qui ont leur puissance (une veritable puissance) dans leur point de
vue. Je serais bien fachee de les ebranler, si je le pouvais, et, comme
je ne le peux pas, mes notions et mes instincts, a moi, sont le droit de
ma these, sans aucun danger ni dommage pour ceux qui sont forts avec la
these contraire.
Des coups de baton, je veux bien t'en donner; mais tu es un affreux
blagueur qui ne viens jamais les chercher.
Quant a ce que je devais dire sur les martyrs de la cause, je l'ai dit;
mais cela doit rester dans le tiroir jusqu'a nouvel ordre. Tu crois donc
que l'on est libre de dire quelque chose? Je te trouve beau, toi avec
tes mains dans tes poches, sur le pave de Bruxelles! J'ai essaye, au
dernier chapitre du roman[1], de faire pressentir quelque chose de ma
pensee; mais il n'est pas dit encore que cela passe.
Trois lignes sur Lamennais ont ete coupees a propos des capucins de
Frascati, chez lesquels il avait demeure, et pourtant _la Presse_ fait
son possible pour laisser vivre le redacteur; _ma_ nous sommes dans le
royaume de la mort!
Donc, puisque l'on ne peut parler de ce qui, a Rome, est muet, paralyse,
invisible, il faut ereinter Rome, ce que l'on en voit, ce que l'on y
cultive, la salete, la paresse, l'infamie. Il ne faut faire grace a
rien, pas meme aux monuments qui consolent les stupides touristes, faux
artistes, sans
|