s de la surface; le rat des champs, qui ne manque
jamais de faire la provision d'hiver en temps utile; les oiseaux
emigrants, qui semblent doues d'un sens divinatoire; en sauraient-ils
plus long que nous a mille egards?
A vous dire le vrai, je ne crois pas beaucoup a la terreur des animaux,
meme durant une eclipse totale de soleil. Je les crois avertis par
l'instinct du peu de duree du phenomene.
CDXII
A M. CHARLES PONCY, A TOULON
Nohant, 15 aout 1857.
Cher enfant,
Ne donnez jamais les lettres des defunts que l'on vous demande. Cela
cache, en general, des speculations. Celles qui sont honnetes (comme
les lettres de Lamennais recueillies assez religieusement par Old-Nick)
n'aboutissent pas, et risquent, pour tout resultat, de vous priver de
vos autographes qui s'egarent. Ces essais n'aboutissent pas, par la
raison que les parents, heritiers, ou amis executeurs testamentaires,
reclament le monopole de ces publications. C'est leur droit. Ils
l'exercent tantot par cupidite, tantot par respect veritable pour la
memoire du defunt. En effet, si le defunt revenait, il ne serait pas
toujours tres content de voir publier entierement des lettres qu'il n'a
pas destinees au public. On est donc oblige de tronquer. Eh bien, cela
n'est pas tres facile. Les gens qui publient demandent, a ceux qui
cedent leurs lettres, d'avoir l'autographe entre les mains, se disant
responsables de l'authenticite de ces lettres. Des ce moment, vous etes
a leur discretion. S'ils publient ce que vous ne voulez pas, a qui vous
en prendrez-vous? Bref, on se lance dans de grands ennuis et on s'expose
a des tracasseries judiciaires fort desagreables.
Dans mon souvenir, les lettres de Beranger a vous sont aigres-douces
pour moi. Celles qu'il m'a ecrites sur vous sont mechantes pour vous. Il
etait mechant d'esprit et de langue, bien que le coeur fut noble et la
conduite noble dans tout ce qui avait rapport a lui-meme. Il savait
donner et ne pas recevoir. C'etait une grande science dans sa position;
mais il etait bien flatteur et bien perfide la ou il ne risquait rien,
et il abusait souvent du respect religieux que l'on avait pour son
genie, pour son age et pour sa probite. Le pauvre Eugene Sue, mort si
jeune, avait un bien autre coeur!
Vos vers sur sainte Solange sont tres beaux et charmants. Mais vous
travaillez dans la prose du gagne-pain avec douleur, je le vois. Non,
pourtant: je vois aussi que vous et
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