ous parler d'eux, et de faire que ma
lettre vous soit agreable. Je les ai donc vus ce soir, ou hier soir
(car il est une heure du matin) et je les ai trouves tous quatre beaux,
frais, roses, gentils a croquer; Georges tres drole et faisant la
conversation d'une facon tres comique. Il est trop mignon entre les deux
petites qu'il mene, chacune d'une main, dans les allees pleines de roses
de votre petit jardin.
La jolie niece[1] (fille de Valerie) etait avec eux, gracieuse et
elegante comme toujours. Tout ce petit monde, si beau et si pare
(c'etait la Fete-Dieu, je crois), me faisait penser qu'il y a des gens
plus navres que vous, mon pauvre enfant! Vous reverrez tout cela, et,
moi, je n'eleverai plus rien sur mes genoux, que les enfants des autres.
Sol a fini la vie de ce cote, et Maurice semble ne vouloir jamais la
commencer. Et puis, d'ailleurs, aimerais-je les nouveaux comme j'aimais
celle[2] qui est allee si loin, si loin, que je ne la rejoindrai pas
dans ce monde?
Mais parlons de vous et de cette Belgique ou vous voila, je le vois,
decide tout a fait a aller. Angele m'apprend que c'est arrange. Donc,
adieu mes projets d'Italie; car je ne crois pas qu'on me permette
d'aller vous voir la-bas. Et puis ce milieu qui est enrage de _pouvoir_
et qui n'est pas socialiste du tout, ne me va guere. Enfin, vous le
voulez! Vous avez sans doute de fortes raisons tout a fait en dehors de
la politique, et je m'imagine les deviner, et, si je devine bien, helas!
vous n'avez peut-etre pas tort. Ce qui me console, c'est que, si l'hiver
endommage les enfants, vous retournerez vite a Aix, ou je m'imaginais
que vous seriez bien tout a fait. Ne vous fermez point cette porte
au moins, je vous en supplie! ne quittez pas M. de Cavour sans
remerciements et sans lui dire que des affaires personnelles vous
appellent ailleurs, mais que vous reviendrez probablement reclamer son
bon vouloir. Cela ne coute rien et n'engage a rien.
Bonsoir, mon cher enfant; j'espere avoir de vos nouvelles avant que vous
quittiez Turin, et je me hate de fermer ma lettre pour qu'elle ne tourne
pas a l'_in-octavo_, et qu'elle vous parvienne avant votre depart.
A vous bien tendrement.
[1] Madame Tournier, petite-fille de Jules Neraud.
[2] Jeanne Clesinger, sa petite-fille.
CDXXXIII
A MADEMOISELLE LEROYET DE CHANTEPIE, A ANGERS
Nohant, 5 juin 1858.
Il n'y a pas, je crois, d'ame plus genereuse et plus pure que l
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