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financier_, le venaient visiter. Ils s'enfermaient et restaient des
heures en conference, parlant si bas qu'on n'entendait meme pas un
vague murmure a travers la porte.
--Votre pere a de graves sujets d'inquietude, mes enfants, disait Mme
Favoral, vous pouvez me croire, moi qui depuis vingt ans epie notre
sort sur sa physionomie.
Mais les evenements politiques suffisaient a expliquer toutes les
inquietudes.
On entrait dans la seconde semaine de juillet 1870, et les destinees
de la France se jouaient comme aux des entre quelques incapacites
presomptueuses.
Etait-ce la guerre avec la Prusse, ou la paix, qui allait sortir des
complications d'une politique puerilement astucieuse?
Les bruits les plus contradictoires imprimaient chaque jour a la
Bourse des oscillations furieuses, dont l'imprevu faisait crouler
les fortunes les mieux assises. Quelques paroles prononcees dans
un couloir par Emile Olivier avaient enrichi une douzaine de gros
joueurs, mais en avaient ruine cinq cents petits. De tous cotes, le
credit craquait.
Jusqu'a ce qu'un soir en rentrant:
--C'est decide, dit M. Favoral, la guerre est declaree.
Ce n'etait que trop reel, et nul alors en France ne redoutait la
guerre. On avait tant exalte l'armee francaise, on avait tant repete
qu'elle etait invincible, que nul, dans le public, ne mettait en doute
une serie de victoires foudroyantes.
Helas! le premier telegramme qui parvint a Paris annoncait une
defaite. On n'y voulait pas croire. Il fallut bien se rendre a
l'evidence. Les soldats avaient su mourir, mais les chefs n'avaient
pas su commander.
Et de ce moment, avec une rapidite vertigineuse, de jour en jour,
d'heure en heure, plutot, les nouvelles fatales se succederent.
Comme un fleuve qui rompt ses digues, la Prusse se ruait sur la
France. Bazaine etait cerne sous Metz, et la capitulation de Sedan
mettait le comble a tant de desastres.
Enfin, le 4 septembre, la Republique fut proclamee.
Le 5, quand le signor Gismondo Pulci se presenta rue Saint-Gilles pour
donner sa lecon, il avait la figure a ce point bouleversee, que Mlle
Gilberte ne put s'empecher de lui demander ce qu'il avait.
Il se dressa, sur cette question, et menacant le ciel de son poing
crispe:
--J'ai, repondit-il, que l'implacable fatalite ne se lasse pas de me
persecuter! J'avais surmonte tous les obstacles, j'etais heureux,
j'entrevoyais un avenir de fortune et de gloire, j'y touchais,
l'affreuse guerre e
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