le a tant desire, la consideration, Mme de
Maintenon le possede enfin. Le parti devot la regarde comme un oracle. Les
prelats les plus eminents la tiennent en haute estime; c'est elle qui
travaille avec eux a la conversion du roi; c'est elle qui le rapproche
de la reine; c'est elle qui, avec son eloquence insinuante et douce,
plaide a la cour la cause de la morale et de la religion.
[Note 1: Lettre du 14 fevrier 1680.]
V
LA DAUPHINE DE BAVIERE
A cote des types dominateurs qui s'imposent a l'attention de la posterite,
il y a place, dans l'histoire, pour des figures plus calmes, plus douces,
plus recueillies, qui de leur vivant resterent dans l'ombre, dans le
silence, et qui conservent, pour ainsi dire, une sorte de modestie et de
reserve meme au dela du tombeau. Des princesses se sont rencontrees, que
le tumulte du monde, l'eclat de la puissance, la splendeur du luxe, n'ont
pu arracher a leur tristesse native, qui ont ete humbles et timides au
milieu des grandeurs, qui se sont fait a elles-memes une solitude, et qui,
suivant les expressions de Bossuet, ont trouve dans leur oratoire, malgre
toutes les agitations de la cour, le carmel d'Elie, le desert de Jean et
la montagne si souvent temoin des gemissements de Jesus.
Il y a dans le sourire de ces femmes un melange d'indulgence et de
douleur, d'attendrissement et de chagrin, de compassion et de bonte. Elles
semblent n'avoir occupe les situations les plus hautes que pour nous
inspirer des reflexions philosophiques et des pensees chretiennes; pour
nous prouver, par leur exemple, que le bonheur n'habite pas toujours les
palais; que les choses exterieures ne donnent point les veritables joies;
que "la grandeur est un songe, la jeunesse une fleur qui tombe, et la
sante un nom trompeur [1]".
[Footnore [1]: Bossuet, _Oraison funebre de la reine Marie-Therese_.]
Parmi ces figures plaintives, pales apparitions de l'histoire dont la
carriere peu feconde en peripeties dramatiques renferme des enseignements
chretiens, il faut placer Marie-Anne-Christine-Victoire, fille de
Ferdinand, electeur, duc de Baviere, dauphine de France. La vie de cette
princesse, nee en 1660, mariee en 1680 au fils de Louis XIV, morte a
Versailles en 1690, a l'age de vingt-neuf ans, pourrait se resumer par un
seul mot: melancolie. C'etait une de ces natures depaysees sur la terre et
aspirant au ciel, dont Bossuet aurait pu dire, comme de la reine: "La
terre, son origine et sa sepulture
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