disparu du ciel conjugal de Louis XIV et de Marie-Therese. Les
querelles de Mme de Montespan et de Mme de Maintenon etaient apaisees. Ces
deux dames ne se voyaient plus l'une chez l'autre; mais partout ou elles
se rencontraient, elles se parlaient et avaient des conversations si vives
et si cordiales en apparence, que qui les aurait vues sans etre au fait
des intrigues de la cour aurait cru qu'elles etaient les meilleures amies
du monde[1]. La reine disait avec reconnaissance, en parlant de Mme de
Maintenon: "Le roi ne m'a jamais traitee avec autant de tendresse que
depuis qu'il l'ecoute."
[Note 1: _Souvenirs de Mme de Caylus_.]
L'annee 1683 s'annoncait donc comme devant etre heureuse pour la compagne
de Louis XIV. Mais la mort s'avancait a grands pas. Une maladie
foudroyante allait enlever la reine, agee seulement de quarante-cinq ans.
Cette princesse si bonne, si vertueuse, dont Bossuet a dit: "Elle marche
avec l'Agneau, car elle en est digne", cette reine, qui portait le manteau
fleurdelise comme un cilice, cette pieuse Marie-Therese mourut comme elle
avait vecu, avec une douceur angelique. Louis XIV, qui lui avait donne
tant de soucis, la pleura sincerement: "Eh quoi! s'ecriait-il, il n'y a
plus de reine en France. Quoi! je suis veuf! je ne saurais le croire, et
cependant il est vrai que je le suis, et de la princesse du plus grand
merite.... Voila le premier chagrin qu'elle m'ait donne."
Louis XIV, si souvent et si justement accuse d'egoisme, s'etait cependant
deja montre capable d'affection et de regrets lorsqu'il avait perdu sa
mere. Il ecrivit dans les Memoires destines au dauphin:
"Quelque grandeur de courage dont j'eusse voulu me piquer, il n'etait pas
possible qu'un fils attache par les liens de la nature put voir mourir sa
mere sans un exces de douleur, puisque ceux-la memes contre lesquels elle
avait agi comme ennemie ne pouvaient s'empecher de la regretter et
d'avouer qu'il n'avait jamais ete une piete plus sincere, une fermete plus
intrepide, une bonte plus genereuse. La vigueur avec laquelle cette
princesse avait soutenu ma dignite, quand je ne pouvais pas la defendre
moi-meme, etait le plus important et le plus utile service qui me put etre
jamais rendu... Mes respects pour elle n'etaient point de ces devoirs
contraints que l'on donne seulement a la bienseance.
"Cette habitude que j'avais formee de n'avoir ordinairement qu'un meme
logis et qu'une meme table avec elle, cette assiduite avec laqu
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