que vous vous melez trop peu des affaires. Votre esprit en est
plus capable que vous ne pensez. Vous vous defiez peut-etre un peu trop de
vous-meme, ou bien vous craignez trop d'entrer dans des discussions
contraires au gout que vous avez pour une vie tranquille et recueillie."
Que Mme de Maintenon ait eu de l'influence sur quelques choix, cela ne
parait pas contestable; mais qu'elle ait, a elle seule, fait marcher tous
les ministeres, c'est la une pure invention. Elle etait sincere,
croyons-nous, quand elle ecrivait a Mme des Ursins: "De quelque facon que
les choses tournent, je vous conjure, madame, de me regarder comme une
personne incapable d'affaires, qui en a entendu parler trop tard pour y
etre habile, et qui les hait encore plus qu'elle ne les ignore.... On ne
veut pas que je m'en mele, et je ne veux pas m'en meler. On ne se cache
point de moi; mais je ne sais rien de suite, et je suis tres souvent mal
avertie."
Lisant ou faisant de la tapisserie pendant que le roi travaillait avec
l'un ou l'autre de ses ministres, Mme de Maintenon ne prenait timidement
la parole que lorsqu'elle y etait formellement invitee. Son attitude a
l'egard de Louis XIV etait toujours celle du respect. Le roi lui disait,
il est vrai:
"On appelle les papes Votre Saintete, les rois Votre Majeste. Vous,
madame, il faut vous appeler Votre Solidite."
Mais cet eloge ne tournait pas la tete a une femme raisonnable et si
mesuree.
En resume, que reproche-t-on surtout a Louis XIV? Ses guerres, sa passion
pour le luxe, son fanatisme religieux. En quoi cette triple accusation
peut-elle peser sur Mme de Maintenon? Bien loin de pousser a la guerre,
elle ne cesse de faire les voeux les plus ardents pour la paix:
"Je ne respire qu'apres la paix, ecrit-elle en 1684; je ne donnerai jamais
au roi des conseils desavantageux a sa gloire; mais si j'etais crue, on
serait moins ebloui de cet eclat d'une victoire, et l'on songerait plus
serieusement a son salut, mais ce n'est pas a moi a gouverner l'Etat; je
demande tous les jours a Dieu qu'il en inspire et qu'il en dirige le
maitre, et qu'il fasse connaitre la verite."
M. Michelet, si peu bienveillant pour elle, avoue pourtant qu'elle
regretta profondement la guerre de la succession d'Espagne. Il dit que
"les seuls qui gardaient le bon sens, la vieille Maintenon et le maladif
Beauvilliers, voyaient avec terreur qu'on se lancait dans l'epouvantable
aventure qui allait tout engloutir.... De meme qu'el
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