M. Lavallee, forcement incomplet, n'en est pas
moins un monument historique d'une tres haute valeur. Deux volumes de
lettres et d'entretiens sur l'education des filles, deux autres de lettres
historiques et edifiantes adressees aux dames de Saint-Cyr, quatre volumes
de correspondance generale, un de conversations et proverbes, un autre
d'ecrits divers, enfin un dernier qui comprend les Souvenirs de Mme de
Caylus, les Memoires des dames de Saint-Cyr et ceux de Mlle d'Aumale, tel
est l'ensemble d'une publication qui a mis en pleine lumiere une figure
eminemment curieuse a etudier.
Le recueil de La Beaumelle, l'ennemi de Voltaire, contenait, a cote de
beaucoup de lettres authentiques, un grand nombre de lettres apocryphes.
Il y avait des changements, des interpolations, des additions, des
suppressions. Au moyen de pieces fabriquees, on avait insere des phrases a
effet, des reflexions piquantes, des maximes a la mode au XVIIIe siecle.
M. Lavallee a trouve moyen de separer le bon grain de l'ivraie. Passant le
recueil de La Beaumelle au crible d'une critique sagace, il est parvenu a
retablir le texte des lettres vraies et a prouver le caractere apocryphe
de celles qui etaient fausses. Comme les vrais connaisseurs en
autographes, il se defiait des lettres saisissantes. Les falsificateurs
sont presque toujours imprudents. Ils forcent la note, et, quand ils se
mettent a inventer un document, ils veulent que leur invention produise
une impression saisissante.
La correspondance des personnages celebres est en general beaucoup plus
simple, beaucoup moins appretee que les pretendus autographes qu'on leur
attribue. Il faut se tenir en garde contre les lettres ou se trouvent soit
des portraits acheves, soit des jugements profonds, soit des predictions
historiques. C'est la souvent un signe de falsification, et, plus on est
frappe par un autographe, plus il faut etudier avec soin sa provenance.
Les lettres de Mme de Maintenon meritaient la peine qu'on a prise pour en
etablir d'une maniere exacte les dates et l'authenticite. L'historien de
Mme de Sevigne, le baron Walckenaer, les place, sans hesiter, au premier
rang.
"Mme de Maintenon, dit-il, est pour le style epistolaire un modele plus
acheve que Mme de Sevigne. Presque toujours celle-ci n'ecrit que pour le
besoin de s'entretenir avec sa fille, avec les personnes qu'elle aime,
afin de tout dire, de tout raconter. Mme de Maintenon, au contraire, a
toujours en ecrivant un objet
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