fascine et l'attire.
Rosine, cependant, continue a rever;
Il semble qu'elle ait peur de ce qu'elle va dire.
--Mais lui, d'une voix grave, avec un doux sourire:
Quel silence! Rosine, et qu'en dois-je augurer?
Ces mots que votre bouche hesite a murmurer,--
Soyez franche,--sont ceux que je tremble d'entendre.
Si je l'ai devine, pourquoi vous en defendre?
Pourquoi rester muette et me laisser au coeur
Un doute, plus cruel encor que sa douleur?
Et surtout....
ROSINE.
Je sais bien ce que vous m'allez dire,
Stello; mais songez donc: vous me forcez ici
D'accepter un amant ou de perdre un ami.
STELLO.
Rosine, ecoutez-moi. Pour un homme, le pire
Qui lui puisse arriver quand il est amoureux,
C'est de se voir bercer de ce mot vague et creux
Qui, s'il n'est un mensonge, est encor un blaspheme.
Que me fait l'amitie de la femme que j'aime?
J'aime! C'est dire assez qu'il me faut votre corps,
Vos larmes, vos baisers, votre ame tout entiere!
Et vous allez m'offrir une telle misere?
Appelez vos laquais pour me jeter dehors.
Soyez plus charitable en etant plus altiere.
Avouez-moi plutot que je vous fais horreur
Et que vous m'execrez, que mon amour vous blesse,
Mais ne me plongez pas ce poignard dans le coeur
D'avoir encor pitie de moi dans mon malheur.
ROSINE.
Vous me comprenez mal et j'en ai de tristesse,
Failli pleurer, Stello.
STELLO.
Maudite ma tendresse
Qui fait naitre une larme en un regard si doux!
O ma reine! Oh! pardon!
ROSINE, souriant.
Vous passez a l'extreme;
Ne soyez point trop tendre apres ce grand courroux.
Vous aime-je en ami? Je l'ignore moi-meme.
N'ayant jamais aime, sais-je si je vous aime?
STELLO.
Non, vous ne m'aimez pas.
ROSINE.
Je le crois comme vous,
C'est vrai. Car je sens bien qu'un jour, s'il se reveille,
Mon coeur, qu'on dit absent, qui, peut-etre, sommeille
En attendant son heure, inondera mes sens
Comme un torrent sans frein qui renverse ou qui brise,
Ou qu'il m'envahira dans une ardente crise
Comme un feu souterrain comprime trop longtemps.
Certes, l'emotion que votre aveu me cause
Est bien loin de cela, pour etre de l'amour,
Mais, ce que vous etiez pour moi jusqu'a ce jour,
Je ne m'en rends pas compte et n'en sais autre chose
Que le vague plaisir que j'avais de vo
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