he avait ete muette,
Celle qui, froidement, avait brise ce coeur
Et s'etait fait un jeu d'une atroce douleur,
Ressentit a son tour cette fievre inquiete
Dont il avait souffert, et se prit a l'aimer.
IX
Que faire au bal masque si ce n'est d'y flaner,
Quand on est amoureux et qu'on sait que sa mie
Ne s'y doit point trouver? Lecteur, je vous supplie,
Lorsqu'on la sait chez elle et qu'on y doit aller,
Que faire en attendant sinon que d'y flaner?
Stello pensait ainsi. Revant a sa maitresse
Et contraint d'etre au bal, il flanait de son mieux,
Par-ci par-la mettant un nom sur une tresse,
Et s'amusait de voir passer devant ses yeux
Ce cortege dansant et d'ecouter sans cesse
Le gai bourdonnement de cet essaim joyeux.
Il restait donc perdu dans cette reverie
Ou ce flot paillete de rire et de folie,
De soie et de velours l'enfoncait pas a pas;
Suivant ce reve ami sans en chercher la cause,
Lorsqu'il en fut tire par un domino rose
Qui, prononcant son nom et lui prenant le bras,
L'entraina dans le bal en lui parlant tout bas.
A l'azur de ses yeux pleins d'ombre et de tendresse,
Stello croyait avoir reconnu sa maitresse.
Il etait bien un peu surpris de la voir la,
A cette heure, tandis qu'il la croyait chez elle;
Peut-etre aussi ... vexe qu'on le crut infidele:
Mais quel mal un amant peut-il voir a cela?
Il est vrai que Rosette etait peu coutumiere
Du fait; mais une nuit, mauvaise conseillere,
Avait pu lui souffler au coeur quelque soupcon.
Donc, a n'en pas douter, c'etait elle. La chose,
Au reste, etait d'autant plus probable que Rose
Connaissait quelque peu le maitre de maison.
A propos de cela, madame, il faut vous dire
--Ce qui fut fait deja, si je savais ecrire,--
Qu'entre ces deux beautes, dont il est question,
La seule difference apparente et tranchee
Etait un signe noir gros comme un grain de plomb
Dont Rosette portait la main gauche marquee.
Or donc, il arriva ce que vous prevoyez:
Qu'un gant trompa Stello; qu'a force de tendresse,
De ruse feminine et de regards noyes,
De desir et d'amour, cette autre enchanteresse
Eut raison du jeune homme ... et qu'il etait trop tard,
En un mot, quand Stello reconnut la comtesse.
En vain eut-il voulu maudire le hasard;
Sa bouche ne pouvait mentir a sa pensee;
Tout son amour passe lui refluait au coeur,
Envahissant soudain sa poitrine oppressee,
Sans qu'il en pu
|