ont decolore.
Mais non, c'etait un songe, elle n'a pas bouge.
Son front est reste pale, et sa levre entr'ouverte
Sous les rayons mourants n'a pas meme tremble.
Rien! Pas meme un soupir dans la chambre deserte!
O sombre et lente nuit! O funebre clarte!
Rien! Rien que le silence et l'immobilite.
N'osant plus l'appeler, il prend sa main inerte:
Cette main est glacee et retombe aussitot.
Alors, sans qu'une larme a ses yeux soit montee,
Il pousse un long cri sourd d'une voix etouffee,
Et, sur ce meme lit ou Rosette est couchee,
Une derniere fois, sans prononcer un mot,
Serrant entre ses bras cette fille adoree,
Dans un dernier baiser jette un dernier sanglot.
Deja de ce beau corps l'ame etait envolee;
Il ne pressa sur lui qu'une ombre inanimee....
Sa main fut sans etreinte et sa voix sans echo.
Lors, prenant dans ses bras sa maitresse expiree,
Comme elle avait tenu sa main gauche fermee,
Un papier, qu'il n'avait pas encore apercu,
En tomba tout froisse. L'ouvrant alors, il lut
Le billet que voici, de la main de Rosine:
_"Ce soir, aux Italiens, la chanteuse est divine.
Nouveau duo d'amour; qui viendra l'entendra.
La seconde baignoire est a gauche;--c'est la."_
Alors il comprit tout; et sa tete penchee
Demeura jusqu'au jour dans ses deux mains cachee.
Sa mere, le matin, ne l'eut pas reconnu.
Il est parti depuis et nul ne l'a revu.
Rosine aime le monde et le cherche sans cesse;
Elle souffre, dit-on, d'une etrange tristesse,
Et cherche dans le bruit un oubli mensonger.
Qui de nous, ici-bas, peut sonder son mystere?
Quand le vent du destin a passe sur la terre,
Nul n'a compte les fleurs qu'il en put arracher.
1862.
LEONE
--CONTE AUX JEUNES FILLES--
I
Dans ce temps-la, mesdemoiselles,
Paris etait, comme aujourd'hui,
La ville des epoux fideles;
On en citait bien sept ou huit.
Les gens naifs dormaient la nuit
Et les bonnes moeurs etaient telles
Qu'il fallait qu'un pere eut conduit
Sa fille a trois pieces nouvelles
Pour qu'elle en sut autant que lui.
Comme aujourd'hui, chaque menage
Etait d'un exemple touchant:
Jamais on ne parlait d'argent
Dans les contrats de mariage.
Les maris n'etaient point tenus
D'etre plus riches que Cresus;
Leurs moities etant peu coquettes,
Les trois quarts de leurs revenus
Suffisaient presque a leurs toilettes.
Entre autres details singulier
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