toujours,
Plus las, plus seul qu'aux premiers jours,
Je la retrouvai sur ma route.
Mais son front, quoique jeune encor,
Semblait triste jusqu'a la mort,
Et portait les traces du doute.
Elle rit d'un rire nerveux
En secouant de ses cheveux
Je ne sais quelles fleurs decloses;
Puis, dans un sanglot, murmura:
"Je suis ta Gloire!" et s'engouffra
Dans la mer Bleue aux vagues roses.
IV
Et plus tard enfin, une nuit,
Ronge de fatigue et d'ennui,
J'ai vu cette ange de detresse.
Mais lors, pour la derniere fois,
J'entendis sa mourante voix
Qui me dit: "J'etais ta Jeunesse!"
L'eau la bercait comme un beau lis.
Sur sa gorge aux tons appalis
Du sang se melait a l'ivoire,
Et je vis celle que j'aimais
S'enfoncer morte et pour jamais
Sous les flots verts de la mer Noire.
Mont-Riant, 18 Fevrier 1865.
A MA MERE
Mere, crois-moi, ces quelques vers,
Si mauvais qu'ils puissent paraitre,
Te portent mes voeux les plus chers
Et tout le meilleur de mon etre.
Et ce griffonnage moqueur
Prouve, moralite profonde,
Qu'on peut confier un bon coeur
Aux plus mechants quatrains du monde.
Paris, 31 Decembre 1865.
A MON PERE
Pere, voici cinq ou six vers
Ecrits a tort et a travers.
Si tu fais tant que de les lire,
Dis-moi donc comment il advient
Qu'un enfant qui t'aime si bien,
Ne sache pas mieux te le dire.
Paris, fin Decembre 1865.
ENVOI
DE _ROSINE ET ROSETTE_, A ***
Enfant au seduisant visage,
Vous qui, d'un doigt rose, ouvrirez
Ce volume, et qui le lirez
Si vous en avez le courage,
Rose blonde, quand vous verrez
Votre doux nom sur cette page,
A votre amant vous penserez.
Ne me reprochez pas ce livre,
C'est un mechant petit recit,
Assez mal rime, Dieu merci!
Mais tel qu'il est, je vous le livre:
Tachez d'etre bonne pour lui.
Assez d'autres m'ont fait un crime
De quelques vers trop sans facon.
Vous qui m'avez pris ma raison,
Que peut vous importer ma rime?
Gardez ces vers en souvenir
Du temps ou nous etions ensemble:
Jamais deux coeurs qu'un Dieu rassemble
N'ont ete plus prompts a s'unir.
Paris, Aout 1865.
SOUVENIR DE MARGENCY
--A MON PERE--
Mon pere, il me souvient de cette heureuse enfance
Qui s'ecoulait pour nous entre ma mere et toi.
C'est un frais souvenir: je ne sais pas pourquoi
Depuis tantot j'y
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