rofiter les populations du Dominion des grandes idees
que la France represente dans le monde, et de donner a la
nationalite qui est en voie de formation sur cette partie du
continent une originalite veritable et feconde.
A nous, Canadiens-francais, de profiter des larges libertes
que nous donne la constitution anglaise, pour imprimer le plus
fortement possible le sceau de la France sur ce peuple
nouveau.
Or le moyen le plus efficace d'y arriver, c'est de conserver
notre belle langue avec un soin jaloux. Mais conservons-la
intacte, et pour cela, il faut l'etudier. La langue francaise
est la plus belle des langues modernes, mais peut-etre aussi
la plus difficile. Il ne suffit pas de connaitre les regles
des participes sur le bout du doigt pour savoir le francais;
et quand on est parvenu a l'apprendre, ce n'est pas encore
tout: il faudrait le bien parler. Et sur ce point une reforme
ne serait peut-etre pas deplacee dans nos colleges et nos
pensionnats de jeunes filles. Les _icitte_, les _bin_, les
_itout_, les _pantoute_--pour citer quelques-uns des
barbarismes populaires qui s'introduisent dans la conversation
de nos classes reputees instruites--devraient etre severement
proscrits de nos maisons d'education, au meme titre que les
anglicismes. Malheureusement on n'y fait que tres peu
d'attention; et il en resulte que meme ceux qui ecrivent
passablement leur langue, la parle quelquefois d'une facon
atroce.
"La langue francaise, c'est un diamant d'un prix inestimable;
c'est une oeuvre d'art travaillee par les siecles, d'une
beaute a nulle autre pareille. Tout le monde l'admire, elle
charme tout le monde, bien qu'elle ne livre ses secrets qu'a
un petit nombre; il faut etre amoureux d'elle, l'aimer
beaucoup, lui faire longtemps la cour, et elle ne se donne
qu'a celui qui sait la vaincre par un labeur perseverant et
une longue constance. Mais quels tresors elle revele a ses
favoris! Sa delicatesse exquise ravit l'intelligence; elle est
tout amour et tout gaiete, pleine de noblesse et
d'enthousiasme, accessible aux sciences comme a la fantaisie,
a toutes les hautes pensees comme a tous les sentiments
dignes; elle comprend votre coeur, et seconde votre esprit. Si
vous la possedez, rien ne vous decidera jamais a y renoncer.
Vous la garderez comme votre meilleur bien.[1]"
C'est en 1870 que M. Dunn e
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