peuple distinct, homogene, ayant sa religion, ses lois, ses
universites, sa litterature--et, grace aux libertes
constitutionnelles que lui garantit la
Grande-Bretagne--pouvant, autant que qui que ce soit au monde,
se vanter d'etre son propre maitre.
La race francaise a donc une vitalite exceptionnelle, puisque
la conquete, l'isolement et meme la persecution n'ont pu ni
paralyser la croissance numerique ni entraver le developpement
prodigieux de cette poignee de colons ainsi violemment separes
de leur mere-patrie!
Que les Canadiens soient restes catholiques, cela peut
surprendre l'historien; mais ils auraient pu renoncer a leur
idiome sans perdre la foi de leurs peres: l'exemple de
l'Irlande est la pour le prouver. Pourquoi donc ont-ils si
energiquement et si fidelement conserve la langue francaise?
Cette question demanderait des developpements qui ne
tiendraient pas dans le cadre d'une Introduction. Mais il me
semble qu'a part le fait que, par la predication evangelique,
la langue francaise est toujours demeuree identifiee, pour
ainsi dire, avec la religion, une des causes principales de sa
conservation se trouve dans son originalite meme et dans le
cachet particulier que lui donne la civilisation qu'elle
represente. Voila ou je vois le secret de sa preservation, en
meme temps que celui de son influence sur le monde americain.
Du Nouveau-Brunswick a la Louisiane, il y a des descendants de
Francais qui citent Racine a cote de Pope, Victor Hugo a cote
de Shakespeare. De ce melange de deux civilisations souvent
rivales et toujours distinctes, il ne peut manquer de sortir
un element puissant, un peuple qui aura son caractere propre,
lequel sera la resultante necessaire de toutes les forces que
les divers groupes nationaux de l'age present auront su mettre
en jeu.
Cette these de l'influence de la langue francaise en Amerique
a recu une sanction officielle de la part de lord Dufferin,
dans sa reponse a l'adresse que lui presenta l'Assemblee
Legislative au moment ou il quittait le pays, et tout
recemment, au banquet de la Saint-Jean-Baptiste, de la part de
son successeur a Rideau-Hall, le marquis de Lorne. Tous les
deux ont exprime cette pensee que, loin d'essayer a faire
disparaitre le francais, l'autorite anglaise devrait au
contraire en favoriser la diffusion, comme un moyen sur de
faire p
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