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(vous comprenez que ce n'est pas de vous que je les crains), je
laisserai la place au plus puissant, et, sans vengeance, sans colere,
je jouirai de ma conscience et de ma liberte. Vous avez trop d'esprit
pour ne pas reconnaitre bientot que je ne merite pas toute cette
durete.
Adieu, chere petite maman; mes enfants se portent bien; ma fille est
belle et mauvaise, Maurice est maigre et bon. Je suis contente de son
caractere et de son travail. Je gate un peu ma grosse fille: l'exemple
de Maurice, qui est devenu si doux, me rassure pour l'avenir.
Ecrivez-moi, chere maman; je vous embrasse de toute mon ame.
LXVII
A MADAME DUVERNET MERE, A LA CHATRE
Nohant, lundi, juin 1831.
Chere dame,
Je rentre toute comblee de votre bonne amitie et de votre douce
hospitalite. Je trouve non pas M. de Latouche, mais une lettre de lui
m'annoncant que des affaires imprevues, relatives au _Figaro_ avec M.
le prefet de la Charente, qui vient de se declarer en faillite, l'ont
empeche de partir au moment ou il allait enfin se decider. Il nous
promet d'arriver quand nous ne l'attendrons plus. Il se plaint un peu
du silence de Charles et du votre.
Ne viendrez-vous pas aussi manger mes petits pois, cueillir mes fleurs
et choisir vous-meme vos petites colonies d'oeillets? Deux ou trois
rayons de soleil secheront nos chemins, et vous avez une infinite de
pataches en votre possession. Accordez-moi donc une bonne journee tout
entiere avec le bon meunier, son fils et l'ane... Je ne vois autour de
vous que le desservant de T... que nous puissions insulter ainsi. Je
n'ose quasi pas vous embrasser apres une pareille pensee.
LXVIII
A M. CHARLES DUVERNET, A LA CHATRE
Nohant, lundi soir, 25 juin 1831.
Comme nous nous verrons vendredi, entre l'air bienveillant et paternel
du chatelain, et les _decaudinades_[1], nous ne pourrons guere dire
deux mots de suite. Je ne veux pas partir, mon bon Charles, sans vous
dire combien votre amitie m'a ete douce durant ces trois mois. Nous ne
nous connaissions pas, et notre camaraderie d'enfance ne nous eut rien
appris l'un de l'autre, si une affection qui nous est commune ne fut
venue resserrer ce lien et rapprocher nos coeurs, dont les bizarreries
respectives avaient besoin de s'entendre.
Sans vous, j'aurais eprouve bien plus les amertumes de mon interieur.
Votre interet, la confiance avec laquelle je m'epanchais pres
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