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par an. C'est probablement moins que vous ne depensez a Paris dans une annee, et, par-dessus le marche, vous connaitriez Venise, la plus belle ville de l'univers. Si je n'avais pas mon fils cloue au college Henri IV, certainement je prendrais ma fille avec moi et je viendrais me planter ici pour plusieurs annees. J'y travaillerais comme j'ai coutume de faire et je retournerais en France, quand j'en aurais assez, avec un certain magot d'argent. Mais je ne veux pas renoncer a voir mon fils chaque annee, et tout ce que je gagne sera toujours mange en voyages ou a Paris. Adieu, mon vieux; parle-moi de Maurice et de ta fille. Font-ils de bonnes parties ensemble, les jours de conge? J'embrasse Emilie, Leontine et toi, de tout mon coeur. Il y a longtemps que je n'ai eu de nouvelles de ma mere; donne-lui des miennes et prie-la de m'ecrire. CXII A M. JULES BOUCOIRAN, A PARIS Venise, 6 avril 1834. Mon cher enfant, J'ai recu vos deux effets sur M. Papadopoli[1], et je vous remercie. Maintenant je suis sure de ne pas mourir de faim et de ne pas demander l'aumone en pays etranger; ce qui, pour moi, serait pire. Je m'arrangerai avec Buloz, et il pourra suffire a mes besoins sans se faire trop tirailler; car je travaillerai beaucoup. Alfred est parti pour Paris, et je vais rester ici quelque temps. Il etait encore bien delicat pour entreprendre ce long voyage. Je ne suis pas sans inquietude sur la maniere dont il le supportera; mais il lui etait plus nuisible de rester que de partir, et chaque jour consacre a attendre le retour de sa sante la retardait au lieu de l'accelerer. Il est parti enfin, sous la garde d'un domestique tres soigneux et tres devoue. Le medecin[2] m'a repondu de la poitrine, en tant qu'il la menagerait; mais je ne suis pas bien tranquille. Nous nous sommes quittes peut-etre pour quelques mois, peut-etre pour toujours. Dieu sait maintenant ce que deviendront ma tete et mon coeur. Je me sens de la force pour vivre, pour travailler, pour souffrir. Le manuscrit de _Lelia_ est dans une des petites armoires de Boule. Je l'ai, en effet, promis a Planche; pour peu qu'il tienne a ce griffonnage, donnez-le-lui, il est bien a son service. Je suis profondement affligee d'apprendre qu'il a mal aux yeux. Je voudrais pouvoir le soigner et le soulager. Remplacez-moi; ayez soin de lui. Dites-lui que mon amitie pour lui n'a pas change, s'il vous questionne sur mes
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