e me faire passer
pour quelque chose de presentable. S'il fallait soutenir ensuite la
dignite de mon role, je souffrirais trop.
Fais-moi le plaisir de m'envoyer une boite de pains a cacheter les
plus petits possibles. Je t'ai fait de grands et magnifiques presents,
tu peux bien me faire celui-la: autrement, je serai forcee de
t'envoyer mes lettres ouvertes. On ignore a la Chatre l'usage des
pains a cacheter. On se sert de poix de Bourgogne. On y fabrique aussi
des fromages estimes, les habitants sont fort affables. (Voyez le
voyage de _l'Astrolabe_.)
Adieu, cher frere de mon coeur. Je t'ecrirai quand je pourrai. Toi, si
tu as le temps, ecris-moi. Tu sais si je t'aime, petit homme et grande
ame!
GEORGE.
[1] Gustave Papet.
[2] Juliette Rollinat, soeur de Francois Rollinat.
XCII
AU MEME
Nohant, septembre 1832.
Je t'ai ecrit une longue lettre adressee a la Societe des jeunes gens
(au portier). J'etais inquiete de ta sante, vieux. Pourquoi n'ai-je
pas encore de reponse? Je crains vraiment que tu ne sois malade.
Ma mere est partie le 13; je ne l'ai pas reconduite a Chateauroux
comme je t'annoncais devoir le faire. Je te dirai mes raisons;
peut-etre m'attends-tu? Ecris-moi donc au moins comment se porte ton
vieux et triste individu. Mon squelette centenaire dort, fume, prend
du tabac, griffonne du papier, et pleure comme un veau. Si tu te
portes mieux, si tu peux supporter la compagnie d'un galerien ou d'un
pendu, reviens. Si ma tristesse t'ennuie et te fait mal, ne reviens
pas; mais ecris-moi, ne sois plus malade et aime ton vieux George.
Je t'ai demande pour Maurice des instruments _aratoires_, qu'il attend
avec grande impatience. Il me prie de te _tourmenter_ de sa part. Je
te tourmente, sois tourmente.
_Amen!_
XCIII
A MAURICE DUDEVANT, A NOHANT
Paris, 6 decembre 1832.
Mon cher ange,
Nous sommes arrivees hier sans accident et me voila aujourd'hui
presque sans fatigue. Nous sommes toutes reposees. Ta soeur est gaie,
fraiche et gentille. Tout le monde la trouve embellie et mignonne a
croquer. La _petite femme_[1] a tres bien supporte le voyage et n'a
pas seulement leve le nez en traversant Paris. Elle a l'air de ne se
guere soucier des choses nouvelles. Si elle continue a etre ce qu'elle
est aujourd'hui, je serai contente d'elle; car elle fait bien tout ce
qu'elle peut pour m'etre utile.
Je ne te dirai ri
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