part. Dis a
Boucoiran de m'ecrire, qu'il est un paresseux.
Embrasse pour moi ton pere, et dis a Leontine de m'ecrire une petite
lettre, pour que je voie si elle continue ses progres. Je recois un
journal plein d'images assez droles. Quand j'en aurai un paquet, je te
l'enverrai.
Adieu, mignon; je t'embrasse cent mille fois sur ton gros pif et sur
tes joues roses.
Ta mere.
XCV
A M. JULES BOUCOIRAN, A LA CHATRE
Paris, 20 decembre 1832.
Mon cher enfant,
Je n'ai pas repondu a ce que vous me demandiez par une bonne raison:
c'est que je ne sais pas de quoi il s'agit. Sachez ce qu'est devenue
votre lettre et repetez-moi ce qu'il faut faire pour vous.
Vous soignez bien Maurice. Je vous en remercie et vous supplie de
continuer a l'observer de pres.
Empechez-le de sortir par les temps humides. Ces esquinancies sont
desesperantes. Tachez qu'il passe l'hiver sans en avoir de nouvelle.
Au printemps, des qu'il sera ici, je le ferai debarrasser de son
ennemie. L'operation n'est rien, a ce qu'il parait.
Je vis ici comme une recluse. Mon appartement est si bon, si chaud; il
y a tant de soleil et un si beau silence, que je ne peux pas m'en
arracher. Toute la journee, par exemple, je suis obsedee de visiteurs
qui tous ne m'amusent pas. C'est une calamite de mon metier que je
suis un peu obligee de supporter. Mais, le soir, je m'enferme avec mes
plumes et mon encre, Solange, mon piano et mon feu. Avec cela, je
passe de tres bonnes heures. J'ai, pour tout bruit, les sons d'une
harpe qui viennent je ne sais d'ou et le bruit d'un jet d'eau qui est
sous mes fenetres dans le jardin. C'est bien poetique, ne vous en
moquez pas trop.
Je vous dirai que je fais de l'argent; je recois de tous cotes des
propositions.
Je vendrai mon prochain roman quatre mille francs. C'est plus que je
ne demandais, moi qui suis fort bete. La _Revue de Paris_ et la _Revue
des Deux Mondes_ se sont dispute mon travail. Enfin je me suis livree
a la _Revue des Deux Mondes_ pour une rente de quatre mille francs,
trente deux pages d'ecriture toutes les six semaines. _La Marquise_ a
eu un grand succes et a complete les avantages de ma position.
Je n'ai plus le temps de regarder couler ma vie. Pour moi, dont le
coeur n'est pas jovial, l'obligation de travailler est un grand bien.
Solange me donne plus de bonheur a elle seule que tout le reste. Elle
a fait de grands progres d'intelligence et de gentillesse
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