, je m'ecrie interieurement:
--Laid, trois fois laid et stupide le steppe de Rome! O mes belles
landes plantureuses de la Marche et du Bourbonnais, personne ne parle de
vous! Voila ce que c'est que de manquer de peste, de cadavres, de rapins
et de _larmes de poete_!
Enfin, ici, a Frascati, on entre dans un autre monde, un petit monde de
jardins dans les rochers, qui, grace au ciel, ne ressemble a rien et
vous fait comprendre les delices de la vie antique. Je tacherai de vous
en donner peu a peu l'idee; car c'est un cachet bien tranche, et voici
la premiere fois que je me sens vraiment loin de la France et dans
un pays nouveau. Pour aujourd'hui, je ne vous parlerai que de mon
installation dans un domicile etrange comme le reste.
Oubliez vite ce mot que je viens de dire: _les delices de la vie
antique_, en parlant de la villegiature romaine. La campagne qui
m'environne merite le titre de delicieuse; mais la civilisation n'y a
point de part pour le pauvre voyageur, et, si les villas princieres que
je vois de ma fenetre attestent un reste de magnificence, la population
ouvriere et bourgeoise qui vegete a leur pied ne me parait pas s'en
ressentir le moins du monde.
La ville est pourtant jolie, non-seulement par sa situation pittoresque
et son cote de ruines pendant sur le ravin, mais encore par elle-meme.
Elle est bien coupee et assez bien batie. On y arrive par une porte
fortifiee qui a du caractere; la place, bien italienne avec sa fontaine
et sa basilique, annonce une importance, une etendue et une aisance qui
n'existent pas; mais c'est comme cela dans toutes ces petites villes des
Etats de l'Eglise: toujours une belle entree, des monuments, quelques
grandes maisons d'aspect seigneurial, quelque villa elegante ou quelque
riche monastere ayant a vous montrer quelques; tableaux de maitres; et
puis, pour cite, une bourgade d'assez bon air, peuplee de guenilles et
recelant a l'interieur une misere sordide ou une insigne malproprete.
Je suis entre dans vingt maisons pour trouver un coin ou je pusse
m'etablir, et Dieu sait, qu'eleve dans un pauvre village de paysans, je
n'apportais pas la de pretentions aristocratiques. J'ai trouve partout
le contraste particulier a ce pays: un luxe de decoration inutile au
milieu d'un denument absolu des choses les plus necessaires a la vie.
Dans la plus pauvre demeure, des sculptures et des peintures: nulle
part, a moins de prix exorbitants, un lit propre, une chaise ayant ses
quatr
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