que tu lui avais plu. A present, si les choses
vont autrement, s'il doit epouser l'Anglaise et que ton dos lui ait
servi d'echelle, il te devra un beau cadeau de noces, et tout est dit.
Bien que l'explication de la Daniella dut couper court a toute pensee
d'alliance entre elle et moi dans l'esprit de ses parents, je ne pus
supporter le plan ridiculement fourbe qu'elle m'attribuait a l'egard de
sa maitresse. Je crus devoir m'en expliquer avec elle.
--Ma chere, lui dis-je, il vous a plu d'interpreter ma conduite dans un
sens que je desavoue absolument. Je n'ai pas fait semblant d'etre epris
de vos charmes. C'a ete une plaisanterie dont j'etais loin de prevoir
les consequences et que personne, je l'espere encore, n'a prise au
serieux. Quoi qu'il en soit, j'ai eu un grand tort, puisque le resultat
de ceci a ete une mesintelligence momentanee entre vous et des personnes
auxquelles vous deviez etre attachee. Je suis assez coupable sans que
vous me pretiez un projet aussi absurde et aussi cupide que celui de
vouloir me faire aimer d'une personne trop riche pour moi et que je ne
connais pas assez pour l'aimer moi-meme. Je vous prie donc, dans vos
epanchements avec votre nombreuse famille, de ne pas me faire jouer
inutilement ce vilain role.
--Inutilement! reprit-elle en francais, francais qu'il me faut vous
traduire plus que si c'etait de l'italien. Vous consentiriez cependant a
ce que je le fisse utilement?
--Voulez-vous bien vous expliquer?
--Si ma famille se persuadait que nous nous aimons, vous et moi, il
y aurait pour vous quelque inconvenient a le laisser croire, et il
vaudrait mieux donner a penser que vous ne songez qu'a la Medora.
--Et quel serait l'inconvenient dont vous parlez?
--Des coups de couteau pour vous et des coups de poing pour moi.
--De la part de qui? Je veux tout savoir.
--De la part de mon frere, un mechant homme, je vous avertis.... Je ne
depends que de lui, je n'ai plus ni pere ni mere.
--Alors, c'est une menace sous laquelle il vous a plu de me placer, en
faisant vos confidences....
--Moi, vous menacer et vous exposer! s'ecria la Daniella en levant
au ciel ses yeux etincelants. _Cristo!_ croyez-vous que j'aurais dit
seulement que je vous connaissais, si Tartaglia ne fut venu ici ce
matin?
--Tartaglia? Bon! voici le bouquet! Et qu'est-il venu faire a Frascati?
--Il est venu savoir de vos nouvelles de la part de la Medora, mais
en secret, et en se servant d'un pretexte, car
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