bstance premiere, car il y aurait contradiction dans
les termes a dire qu'elle est individu, puisque dans Socrate elle est
l'humanite, moins l'individualite. Elle n'est pas substance seconde,
car elle est l'humanite, moins tout ce qui de l'humanite n'est pas dans
Socrate, c'est-a-dire moins la presque totalite de l'espece. La nature
_Socrate_ porte son nom, la nature humaine porte son nom; l'essence
speciale qui est en Socrate, n'etant ni l'individu ni l'espece, n'est
pas une chose qui suppose un acte de creation different, puisqu'elle est
distinguee de l'individualite qui fait la difference reelle, et separee
de toutes ses semblables qui, reunies, formeraient seules un ensemble de
produits d'une certaine creation. Elle n'est donc point une nature; elle
n'est ni une chose ni une substance, et l'on ne peut dire que l'essence
d'un individu soit l'espece. Mais Abelard a oublie de repondre au
dilemme fondamental de l'objection; cette essence d'humanite, qui est
dans l'individu, est quelque chose ou rien. Ou plutot en remarquant avec
tant de soin qu'elle n'a pu etre nommee, parce que le nom n'a ete donne
qu'aux natures veritables, c'est-a-dire aux choses reelles, il risque
bien de faire entendre que ce qu'il y a en moi d'humain et de non
individuel, n'est rien par soi-meme, ne pouvant etre a soi seul une
substance. Or, l'espece qui est la collection des ressemblances moins
les differences, serait alors une collection de non-substances, et par
consequent de neants, si l'on ne la considere comme une collection
purement intelligible, c'est-a-dire si l'on ne revient au
conceptualisme.
Mais Abelard semble moins preoccupe des objections que des autorites
contraires. Il avoue qu'on en trouve, quoiqu'il pense avoir supprime
toute opposition possible _de la part d'un esprit raisonnable_. Ainsi
Boece a dit: "Quelque nombreuses que soient les especes, le genre est
un, non que chaque espece prenne une part du genre, mais c'est que
chacune a en meme temps tout le genre." Comment concilier ces mots
avec l'idee qu'une partie des essences d'_animal_, qui font le genre
_animal_, est informee par la rationnalite pour faire l'homme, une
partie par la forme de l'irrationnalite pour faire l'ane, et que jamais
toute la quantite du genre n'est dans quelqu'une des especes? Mais Boece
parle ainsi dans le traite ou il soutient que les genres et les especes
ne sont pas[73], ce qui ne pouvait _se soutenir sans un sophisme_. "Dans
un sophisme le faux e
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