es langues
bavardes, mais, en fait, elles se turent sur ce point, et ce jour-
la on ne dit pas un mot de l'etrange visiteur qui, de course en
course, etait venu jusque dans notre petit village.
J'avais quelque soupcon subtil que ce fils des regions tropicales
n'etait point arrive par hasard jusqu'a nous, mais qu'il s'etait
rendu a Dunkelthwaite pour y remplir une mission determinee.
Le lendemain, j'eus la preuve la plus convaincante possible qu'il
etait encore dans les environs, car je rencontrai miss Warrender
pendant qu'elle descendait par l'allee du jardin avec un panier
rempli de croutes de pain et de morceaux de viande.
Elle avait l'habitude de porter ces restes a quelques vieilles
femmes du pays.
Aussi je m'offris a l'accompagner.
-- Est-ce chez la vieille Venables ou chez la bonne femme
Taylforth que vous allez aujourd'hui? demandai-je.
-- Ni chez l'une ni chez l'autre, dit-elle en souriant. Il faut
que je vous dise la verite, M. Lawrence. Vous avez toujours ete un
bon ami pour moi et je sais que je puis avoir confiance en vous.
Je vais suspendre le panier a cette branche-ci et il viendra le
chercher.
-- Il est encore par ici? remarquai-je.
-- Oui, il est encore par ici.
-- Vous croyez qu'il le decouvrira?
-- Oh! pour cela, vous pouvez vous en rapporter a lui, dit-elle.
Vous ne trouverez pas mauvais que je lui donne quelque secours,
n'est-ce pas? Vous en feriez tout autant si vous aviez vecu parmi
les Hindous, et que vous vous trouviez brusquement transplante
chez un Anglais. Venez dans la serre, nous jetterons un coup
d'oeil sur les fleurs.
Nous allames ensemble dans la serre chaude.
A notre retour, le panier etait reste suspendu a la branche, mais
son contenu avait disparu.
Elle le reprit en riant et le rapporta a la maison.
Il me parut que depuis cette entrevue de la veille avec son
compatriote, elle avait l'esprit plus gai, le pas plus libre, plus
elastique.
C'etait peut-etre une illusion, mais il me sembla aussi qu'elle
avait l'air moins contrainte qu'a l'ordinaire en presence de
Copperthorne, qu'elle supportait ses regards avec moins de
crainte, et etait moins sous l'influence de sa volonte.
Et maintenant j'en viens a la partie de mon recit ou j'ai a dire
comment j'arrivai a penetrer les rotations qui existaient entre
ces deux etranges creatures, comment j'appris la terrible verite
au sujet de miss Warrender, ou de la Princesse Achmet Genghis;
j'aime mieux la designer
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