ce
but, petite mere, que j'ai voulu etre officier francais et c'est pour
cet ideal que j'ai fait le sacrifice de mes vingt ans.
Puisque tu lis cette lettre, je suis tombe en brave et vers ma chere
maison, vers la tombe de papa, mes dernieres pensees se sont envolees.
Pauvre mere, ton coeur deja torture recoit un nouveau coup, mais je te
sais vaillante et forte; tu sauras trouver l'energie necessaire pour
surmonter tes terribles epreuves dans la pensee que, plus heureuse,
malgre tout, que beaucoup de meres francaises, il te reste un fils a
elever, qui te donnera la satisfaction que tu dois attendre de lui.
Et toi, mon cher Emile,
Je te recommande maman, tu seras son soutien; c'est pour toi aussi que
j'accepte volontiers le sacrifice, afin que ta vie soit tranquille et
heureuse, que tu aies le bonheur qui ne m'est pas reserve de fonder
un foyer; tu profiteras de tous les instants de ton existence en
perseverant dans le droit chemin et en cherchant a travers toutes les
epreuves ta satisfaction dans le bien.
Tu te souviendras de ton aine, du petit officier de zouaves qui ne
reviendra plus et tu associeras ma memoire a celle de notre cher pere;
je revivrai ainsi en toi tant que durera cet hommage.
Chere Maman, Emile,
Je ne vous demande pas de ne pas me pleurer, je vous interdirais la
seule consolation qui vous reste; mais sachez conserver de la moderation
dans votre peine; notre deuil recent et terrible nous a montre a tous
le peu de prix qu'il convient d'attacher a la vie et il n'est pas sans
noblesse de devouer la sienne a un ideal.
Adieu donc.
Bonnes et affectueuses caresses de votre fils et frere qui vous a
toujours aimes du plus profond de son etre, plus que lui-meme et que
tout.
Fernand FROIDEFON.
_Paroles prononcees par un pupille de l'Assistance Publique, sur le
champ de bataille, quelques secondes avant sa mort:_
"Ecrivez a Monsieur Mesureur que G... est mort a Verdun, qu'il est perdu
dans un grand champ de bataille comme un jour il fut trouve dans la
rue."
CERTIFICAT DE M. LE DIRECTEUR DE L'ASSISTANCE PUBLIQUE
_Vous m'avez demande d'attester l'authenticite des dernieres paroles
prononcees par mon pupille G..., tombe au champ d'honneur le 22 mai
1916.
Je m'empresse de vous adresser copie exacte de la lettre par laquelle le
Lieutenant VOISIN, du 36e Regiment d'Infanterie, me les a rapportees:_
_"J'avais toujours pense, mais le temps m'avait manque jusqu'alors,
a vous
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