ans;
mais si tu exiges le double, nous te le donnerons a condition que
nous ne verrons pas le visage de Daly-Hassan." On se rappelle que ce
Daly-Hassan, ancien brigand pour son compte personnel, vaincu par
Kourroglou, s'est attache a lui par reconnaissance, a grossi son armee
par de nombreux enrolements, et qu'il se distingue dans toutes les
entreprises. Mais il parait que sa cruaute est excessive. Lorsque
Kourroglou, toujours fidele aux lois qu'il a instituees, a repondu aux
marchands: "Oh non! c'est bien assez!" il revient vers ses compagnons,
et Daly-Hassan, qui l'attend au pied de la montagne en lechant ses
moustaches comme un tigre qui a soif, lui demande la permission
d'essayer le tranchant de son sabre sur ces marauds, afin de leur
arracher quelques barils de vin par-dessus le marche. Mais Kourroglou
lui repond: "Vous connaissez le proverbe arabe: la justice constitue la
moitie de la religion!" Et il rentre a Chamly-Bill les poches pleines
d'or et le coeur de bons sentiments.
Mais, helas! il est arrive ce jour nefaste ou le heros doit etre mis a
la plus rude epreuve, et ou sa vanite doit dechainer les maledictions
suspendues sur sa tete. Il faut suivre ce recit dans l'original.
"Un jour, Mohammed-Beg, de la tribu des Kajars, vint visiter Kourroglou
avec douze mille hommes de cavalerie. Ils demeurerent a Chamly-Bill,
buvant et festoyant, jusqu'a ce que les celliers et les cuisines de
Kourroglou fussent completement vides. Le sommelier et le cuisinier
vinrent ensemble l'annoncer a Kourroglou, et dirent: "Tes hotes ont
mange et bu tout ce qu'il y avait ici; ils n'ont pas meme laisse les
croutes ou la lie."
Kourroglou envoya ses gardes roder dans le voisinage, et bientot apres,
on lui signala une caravane. Il fit seller Kyrat; et, arme de pied en
cap, il se dirigea vers la prairie.
Il regarda et vit une immense caravane campee sur ses paturages. Tout
annoncait que le marchand etait un homme puissamment riche. Et dans une
tente dressee pour la circonstance, on voyait deux Turcs assis et jouant
au trictrac. Kourroglou arriva jusqu'a eux, et dit: "Salam!" Un des
Turcs l'apercut, et dit: "Homme, descends de cheval!--Non, je ne veux
pas descendre.--D'ou viens-tu?--Eh quoi! n'avez-vous pu deja reconnaitre
Kourroglou?--Bien, cela est tout a fait different. Kourroglou est un
grand homme; nous lui paierons un tribut pour le sejour que nous avons
fait sur ses terres." Kourroglou crut que le marchand voulait se
debarra
|