tu.
-- Je ne l'ai jamais vu a l'oeuvre, repondit Raoul, mais il est
Breton, cela promet.
-- Oui, oui, reprit de Guiche, et je suis certain qu'il ferait le
coup de mousquet a l'occasion; quant a moi, j'ai deux hommes surs,
qui ont fait la guerre avec mon pere; c'est donc six combattants
que nous representons; si nous trouvions une petite troupe de
partisans egale en nombre a la notre, et meme superieure, est-ce
que nous ne chargerions pas, Raoul?
-- Si fait, monsieur, repondit le vicomte.
-- Hola! jeunes gens, hola! dit le gouverneur se melant a la
conversation, comme vous y allez, vertudieu! et mes instructions,
a moi, monsieur le comte? oubliez-vous que j'ai ordre de vous
conduire sain et sauf a M. le Prince? Une fois a l'armee, faites-
vous tuer si c'est votre bon plaisir; mais d'ici la je vous
previens qu'en ma qualite de general d'armee j'ordonne la
retraite, et tourne le dos au premier plumet que j'apercois.
De Guiche et Raoul se regarderent du coin de l'oeil en souriant.
Le pays devenait assez couvert, et de temps en temps on
rencontrait de petites troupes de paysans qui se retiraient,
chassant devant eux leurs bestiaux et trainant dans des charrettes
ou portant a bras leurs objets les plus precieux.
On arriva jusqu'a Ablain sans accident. La on prit langue, et on
apprit que M. le Prince avait quitte effectivement Bethune et se
tenait entre Cambrin et La Venthie. On reprit alors, en laissant
toujours la carte a Grimaud, un chemin de traverse qui conduisit
en une demi-heure la petite troupe sur la rive d'un petit ruisseau
qui va se jeter dans la Lys.
Le pays etait charmant, coupe de vallees vertes comme de
l'emeraude. De temps en temps on trouvait de petits bois, que
traversait le sentier que l'on suivait. A chacun de ces bois, dans
la prevoyance d'une embuscade, le gouverneur faisait prendre la
tete aux deux laquais du comte, qui formaient ainsi l'avant-garde.
Le gouverneur et les deux jeunes gens representaient le corps
d'armee, et Olivain, la carabine sur le genou et l'oeil au guet,
veillait sur les derrieres.
Depuis quelque temps, un bois assez epais se presentait a
l'horizon; arrive a cent pas de ce bois, M. d'Arminges prit ses
precautions habituelles et envoya en avant les deux laquais du
comte.
Les laquais venaient de disparaitre sous les arbres; les jeunes
gens et le gouverneur riant et causant suivaient a cent pas a peu
pres. Olivain se tenait en arriere a pareille distance, lorsque
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