ourreau, mon Dieu! il me semble que je vais
mourir. L'absolution, mon pere! l'absolution!
-- Dis son nom! s'ecria le moine, et je te la donnerai.
-- Elle s'appelait... mon Dieu, ayez pitie de moi! murmura le
bourreau.
Et il se laissa aller sur son lit, pale, frissonnant et pareil a
un homme qui va mourir.
-- Son nom! repeta le moine se courbant sur lui comme pour lui
arracher ce nom s'il ne voulait pas le lui dire; son nom!...
parle, ou pas d'absolution!
Le mourant parut rassembler toutes ses forces. Les yeux du moine
etincelaient.
-- Anne de Bueil, murmura le blesse.
-- Anne de Bueil! s'ecria le moine en se redressant et en levant
les deux mains au ciel; Anne de Bueil! tu as bien dit Anne de
Bueil, n'est-ce pas?
-- Oui, oui, c'etait son nom, et maintenant absolvez-moi, car je
me meurs.
-- Moi, t'absoudre! s'ecria le pretre avec un rire qui fit dresser
les cheveux sur la tete du mourant, moi, t'absoudre? je ne suis
pas pretre!
-- Vous n'etes pas pretre! s'ecria le bourreau, mais qu'etes-vous
donc alors?
-- Je vais te le dire a mon tour, miserable!
-- Ah! Seigneur! mon Dieu!
-- Je suis John Francis de Winter!
-- Je ne vous connais pas! s'ecria le bourreau.
-- Attends, attends, tu vas me connaitre: je suis John Francis de
Winter, repeta-t-il, et cette femme...
-- Eh bien! cette femme?
-- C'etait ma mere!
Le bourreau poussa le premier cri, ce cri si terrible qu'on avait
entendu d'abord.
-- Oh! pardonnez-moi, pardonnez-moi, murmura-t-il, sinon au nom de
Dieu, du moins en votre nom; sinon comme pretre, du moins comme
fils.
-- Te pardonner! s'ecria le faux moine, te pardonner! Dieu le fera
peut-etre, mais moi, jamais!
-- Par pitie, dit le bourreau en tendant ses bras vers lui.
-- Pas de pitie pour qui n'a pas eu de pitie; meurs impenitent,
meurs desespere, meurs et sois damne!
Et tirant de sa robe un poignard et le lui enfoncant dans la
poitrine:
-- Tiens, dit-il, voila mon absolution!
Ce fut alors que l'on entendit ce second cri plus faible que le
premier, qui avait ete suivi d'un long gemissement.
Le bourreau, qui s'etait souleve, retomba renverse sur son lit.
Quant au moine, sans retirer le poignard de la plaie, il courut a
la fenetre, l'ouvrit, sauta sur les fleurs d'un petit jardin, se
glissa dans l'ecurie, prit sa mule, sortit par une porte de
derriere, courut jusqu'au prochain bouquet de bois, y jeta sa robe
de moine, tira de sa valise un habit complet d
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