tat de moi, je
vous prie, comme d'un ami devoue.
-- Maintenant, ou allez-vous, vicomte? demanda de Guiche.
-- A l'armee de M. le Prince, comte.
-- Et moi aussi, s'ecria le jeune homme avec un transport de joie.
Ah! tant mieux, nous allons faire ensemble le premier coup de
pistolet.
-- C'est bien, aimez-vous, dit le gouverneur; jeunes tous deux,
vous n'avez sans doute qu'une meme etoile, et vous deviez vous
rencontrer.
Les deux jeunes gens sourirent avec la confiance de la jeunesse.
-- Et maintenant, dit le gouverneur, il vous faut changer
d'habits; vos laquais, a qui j'ai donne des ordres au moment ou
ils sont sortis du bac, doivent etre arrives deja a l'hotellerie.
Le linge et le vin chauffent, venez.
Les jeunes gens n'avaient aucune objection a faire a cette
proposition; au contraire, la trouverent-ils excellente; ils
remonterent donc aussitot a cheval, en se regardant et en
s'admirant tous deux: c'etaient en effet deux elegants cavaliers a
la tournure svelte et elancee, deux nobles visages au front
degage, au regard doux et fier, au sourire loyal et fin.
De Guiche pouvait avoir dix-huit ans, mais il n'etait guere plus
grand que Raoul, qui n'en avait que quinze.
Ils se tendirent la main par un mouvement spontane, et piquant
leurs chevaux, firent cote a cote le trajet de la riviere a
l'hotellerie, l'un trouvant bonne et riante cette vie qu'il avait
failli perdre, l'autre remerciant Dieu d'avoir deja assez vecu
pour avoir fait quelque chose qui serait agreable a son
protecteur.
Quant a Olivain, il etait le seul que cette belle action de son
maitre ne satisfit pas entierement. Il tordait les manches et les
basques de son justaucorps en songeant qu'une halte a Compiegne
lui eut sauve non seulement l'accident auquel il venait
d'echapper, mais encore les fluxions de poitrine et les
rhumatismes qui devaient naturellement en etre le resultat.
XXXIII. Escarmouche
Le sejour a Noyon fut court, chacun y dormait d'un profond
sommeil. Raoul avait recommande de le reveiller si Grimaud
arrivait, mais Grimaud n'arriva point.
Les chevaux apprecierent de leur cote, sans doute, les huit heures
de repos absolu et d'abondante litiere qui leur furent accordees.
Le comte de Guiche fut reveille a cinq heures du matin par Raoul,
qui lui vint souhaiter le bonjour. On dejeuna a la hate, et a six
heures on avait deja fait deux lieues.
La conversation du jeune comte etait des plus interessantes pour
Raoul. Aus
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