res traits
semblables; mais comme j'ai beaucoup de plus belles choses a dire,
je ne m'etendrai pas davantage sur ce sujet: aussi bien faut-il que
je raconte la merveilleuse rencontre que je fis dans la foret des
avantures.
CHAPITRE 5
Rencontre et reveil du Prince Zazaraph, grand paladin de la
Dondindandie, avec le dictionnaire de la langue romancienne.
Quoiqu'il ne fut pas difficile de reconnoitre a mes manieres et a
mon langage que j'etois nouveau venu dans le pays, cependant tous
ceux a qui je me joignis et avec qui je m'entretins, trop occupes
apparemment de leurs affaires particulieres, ne songerent presque
point a me faire offre d'aucun service, quoique d'ailleurs ils me
fissent beaucoup de politesse. Enfin un beau jeune homme que ma
presence importunoit peut-etre, m'adressant la parole, me demanda si
j'avois passe par la foret des avantures. Non, lui dis-je, car je ne
la connois seulement pas. Eh bien, reprit-il, vous perdrez ici tout
votre tems jusqu'a ce que vous y ayez passe. Comme vous etes
nouvellement arrive, il est juste de vous instruire. Cette foret est
appellee la foret des avantures, parce qu'on n'y passe jamais sans
en rencontrer quelqu'une; et comme ce pays-ci est le pays des
avantures, il faut que tous les nouveaux venus, des qu'ils arrivent,
passent par la foret, pour se faire ensuite naturaliser dans la
romancie. Elle n'est pas bien loin d'ici, et en suivant ce petit
sentier a main droite, vous la rencontrerez.
Je remerciai le mieux qu'il me fut possible celui qui me donnoit un
avis si important, et m'etant mis en chemin, j'arrivai bien-tot a la
foret. J'entendis en y entrant un fort grand bruit au-dessus de ma
tete, et plus desagreable encore que celui que fait une troupe de
pies effarees, qui voltigent de la cime d'un arbre a l'autre pour se
donner mutuellement l'allarme. J'appercus aussi-tot quelle etoit
l'espece d'oiseaux qui faisoit ce bruit: c'etoient des harpies. On
scait que si ces femmes oiseaux sont grandes causeuses, elles ne
sont pas moins gloutonnes, jusques-la qu'elles se jettent avec
fureur sur une table, et enlevent toutes les viandes dont elle est
chargee. Quoique je ne portasse aucunes provisions, je me mis a tout
evenement sur mes gardes l'epee a la main. Je scavois bien que
c'etoit le moyen de les ecarter; mais je n'en recus aucune insulte,
et j'en fus quitte pour essuier l'infection epouvantable dont elles
empestent l'air tout autour d'elles. Assez pres dela je trou
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