is, Roland, Merlusine, et plusieurs autres dont je
ne me rappelle pas les noms. Rien n'est si brillant que leur
histoire. On les voyoit se signaler par mille exploits inoueis pele
mele avec les genies, les fees, les enchanteurs, les geans, les
endryagues, les monstres, toujours combattans, jamais vaincus. Aussi
le ciel et la terre s'interessant a leurs succes, leur prodiguoient
continuellement les plus grands miracles. Ce qui faisoit de la
Romancie le plus beau pays du monde. Mais un si grand eclat ne
manqua pas d'attirer beaucoup d'etrangers dans le pays, entr'autres
Pharamond, Cleopatre, Cassandre, Cyrus, Polexandre, grands
personnages a la verite, mais qui n'etant pas pour ainsi dire nes
heros comme les premiers, et ne l'etant que par imitation,
demeurerent beaucoup au-dessous de leurs modeles. Cependant comme
ils avoient une valeur et une vertu vraiment extraordinaire, on leur
donna place dans la haute Romancie. Mais les choses degenererent
bien autrement dans la suite; car on recut dans la Romancie
jusqu'aux plus vils sujets, des avanturiers, des valets, des gueux
de profession, des femmes de mauvaise vie. Ce n'est pas que
plusieurs zelateurs romanciens n'ayent fait leurs efforts pour
retablir toute la gloire et le sublime merveilleux des tems passes;
de-la sont venus les heros et les princes des fees, ceux des mille
et une nuit, des contes chinois, et beaucoup d'autres semblables;
mais on voit dans leur histoire les merveilles melees avec tant de
choses pueriles, communes et vulgaires, qu'on ne scait dans quelle
classe il faut les ranger. Enfin pour eviter la confusion, on a pris
le parti de diviser la Romancie en haute et basse. La premiere est
demeuree aux princes et aux heros celebres: la seconde a ete
abandonnee a tous les sujets du second ordre, voyageurs,
avanturiers, hommes et femmes de mediocre vertu. Il faut meme
l'avoueer a la honte du genre humain. La haute Romancie est depuis
long-tems presque deserte, comme vous avez pu vous en appercevoir
dans ce que vous en avez vu, au lieu que la basse Romancie se peuple
tous les jours de plus en plus. Aussi les fees et les genies se
voyant abandonnes, et presque sans pratique, ont pris la plupart le
parti de s'en aller, les uns dans les espaces imaginaires, les
autres dans le pays des songes. C'est ce qui fait que vous ne voyez
plus la Romancie ornee comme elle etoit autrefois d'une infinite de
chateaux de crystal, de tours d'argent, de forteresses d'airain, ni
d
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