s du
theatre, les masses nombreuses des levites armes. Au lieu de cela, on
voit simplement entrer par les cotes un certain nombre de levites tenant
un glaive a la main. Cette figuration manque de grandeur et n'est pas de
nature a faire sentir au public le poids dont la sainte armee devrait
peser sur l'orgueil et sur la colere d'Athalie. Et ici ce sont bien les
sentiments par lesquels passe Athalie qu'il faut nous faire comprendre
et partager. Un glaive a la main des levites ne suffit pas; il faudrait
un appareil plus formidable, et surtout eviter l'entree successive des
levites par les bas cotes. Au moment ou le fond du theatre s'ouvre et
ou l'on apercoit les rangs presses des levites herisses d'armes, le
mouvement orchestrique devrait consister en une marche d'ensemble, de
deux ou trois pas seulement, de toute cette troupe armee, divisee en
deux groupes, l'un a gauche, l'autre a droite du trone. Cette double
poussee imposante agirait avec une puissance que doublerait l'ensemble
du mouvement; et nous participerions au sentiment de surprise et
d'effroi qui s'empare de l'esprit d'Athalie. On peut d'ailleurs juger de
la puissance d'effet que possede un mouvement d'ensemble par les ballets
italiens dont c'est a peu pres le seul merite.
Quand le choeur est appele a jouer un role passif, ce qui avait lieu en
general chez les anciens, la mise en scene demande plus de soins encore
et plus de science; car, dans ce cas, c'est le choeur lui-meme qui
devient le personnage complexe auquel nous nous interessons et avec
lequel nous sympathisons. Il exprime alors les sentiments divers qui
doivent passer dans notre ame et nous agiter comme lui-meme. Tout le
public participe a la situation du choeur, et le triomphe du poete est
de reussir a troubler l'ame du spectateur des memes emotions qui sont
censees troubler l'ame des personnages qui composent la figuration. On
en a un exemple saisissant dans l'_Oedipe roi_, tel qu'on le joue a la
Comedie-Francaise ou il est admirablement mis en scene.
Au lever du rideau, le peuple est a genoux, tendant ses mains
suppliantes vers le palais d'Oedipe. Les sentiments qu'il exprime et qui
l'agitent sont ceux-la memes qui doivent penetrer dans notre ame. C'est
donc de l'attitude de la figuration que depend l'impression que recevra
le public. Cela demande une preparation savante, et une tres grande
severite de discipline. La difficulte est d'ailleurs moins grande quand
le choeur est en majorite compose
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