pendant Laurent ne lui parla pas de son ennui, et Therese fut
surprise de l'entendre faire l'eloge de la ville et du pays. Il declara
meme que les femmes etaient charmantes. D'ou les connaissait-il?
A huit heures, il demanda son pardessus et sortit. Palmer voulut se
retirer aussi.
--Pourquoi, lui dit Laurent, ne restez-vous pas un peu plus longtemps avec
Therese? Cela lui ferait plaisir. Nous sommes tout a fait seuls ici. Je
sors pour une heure. Attendez-moi pour prendre le the.
A onze heures, Laurent n'etait pas rentre. Therese etait fort abattue.
Elle faisait de vains efforts pour cacher son desespoir. Elle n'etait plus
inquiete, elle se sentait perdue. Palmer vit tout et feignit de ne rien
voir: il causa encore avec elle pour tacher de la distraire; mais, comme
Laurent n'arrivait pas, et qu'il n'etait pas convenable de l'attendre
passe minuit, il se retira en serrant la main de Therese. Malgre lui, il
lui apprit dans ce serrement de main qu'il n'etait pas dupe de son courage
et qu'il ressentait l'etendue de son desastre.
Laurent arriva en ce moment et vit l'emotion de Therese. A peine fut-il
seul avec elle, qu'il l'en railla sur un ton qui affectait de ne pas
descendre a la jalousie.
--Voyons, lui dit-elle, ne me faites pas inutilement souffrir. Pensez-vous
que Palmer me fasse la cour? Partons, je vous l'ai offert.
--Non, ma chere, je ne suis pas absurde a ce point. Du moment que vous
avez une societe et que vous me permettez de sortir un peu pour mon compte,
tout est bien, et je me sens en train de travailler.
--Dieu le veuille! dit Therese. Je ferai, moi, ce que vous voudrez; mais,
si vous vous rejouissez de la societe qui m'est venue, ayez le bon gout de
ne pas m'en parler comme vous venez de le faire, je ne saurais le souffrir.
--De quoi diable vous fachez-vous? qu'ai-je donc dit de si blessant? Vous
devenez d'une susceptibilite par trop ombrageuse, ma chere amie! Quel mal
y aurait-il a ce que ce bon Palmer fut amoureux de vous?
--Il y en aurait a vous de me laisser seule avec lui, si vous pensiez ce
que vous dites.
--Ah! il y aurait du mal... a vous abandonner au danger? Vous voyez bien
que le danger existe, selon vous, et que je ne me trompais pas!
--Soit! alors passons nos soirees ensemble et ne recevons personne. Je le
veux bien, moi. Est-ce convenu?
--Vous etes bonne, ma chere Therese. Pardonnez-moi. Je resterai avec vous
et nous verrons qui vous voudrez; ce sera le meilleur et le pl
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