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arrangement.
En effet, Laurent parut revenir a lui-meme. Il entama une bonne etude dans
son atelier et invita Therese a venir la voir. Quelques jours se passerent
sans orage. Palmer n'avait pas reparu; mais bientot Laurent se lassa de
cette vie reglee, et alla le chercher en lui reprochant d'abandonner ses
amis. A peine fut-il arrive pour passer la soiree avec eux, que Laurent
trouva un pretexte pour sortir et resta dehors jusqu'a minuit.
Une semaine se passa ainsi, puis une seconde. Laurent donnait une soiree
sur trois ou quatre a Therese, et quelle soiree! elle eut prefere la
solitude.
Ou allait-il? Elle ne l'a jamais su. Il ne paraissait pas dans le monde;
le temps humide et froid ne permettait pas de penser qu'il se promenat en
mer pour son plaisir. Cependant il montait souvent dans une barque,
disait-il, et ses habits, en effet, sentaient le goudron. Il s'exercait a
ramer et prenait des lecons d'un pecheur de la cote qu'il allait chercher
dans la rade. Il pretendait se trouver bien, pour son travail du lendemain,
d'une fatigue qui abattait l'excitation de ses nerfs. Therese n'osait
plus aller le trouver dans son atelier. Il montrait du depit lorsqu'elle
desirait voir son travail. Il ne voulait pas de ses reflexions, lorsqu'il
etait en train de manifester son idee, et il ne voulait pas non plus de
son silence, qui lui faisait l'effet d'un blame. Elle ne devait voir son
oeuvre que lorsqu'il la jugerait digne d'etre vue. Autrefois il ne
commencait rien sans lui exposer son idee; maintenant, il la traitait
comme _un public_.
Deux ou trois fois il passa toute la nuit dehors. Therese ne s'habituait
pas a l'inquietude que lui causait le prolongement de ses absences. Elle
l'eut exaspere en ayant l'air de s'en apercevoir; mais on pense bien
qu'elle le guettait et qu'elle cherchait a savoir la verite. Il etait
impossible qu'elle le suivit elle-meme la nuit dans une ville pleine de
matelots et d'aventuriers de toute nation. Pour rien au monde, elle ne se
fut abaissee a le faire suivre par quelqu'un. Elle entrait chez lui sans
bruit et le regardait dormir. Il semblait accable de fatigue. C'etait
peut-etre, en effet, une lutte desesperee contre lui-meme qu'il avait
entreprise pour eteindre, par l'exercice physique, l'exces de sa pensee.
Une nuit, elle remarqua que ses habits etaient fangeux et dechires comme
s'il eut eu a soutenir une lutte materielle, ou comme s'il eut fait une
chute. Effrayee, elle s'approch
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