frir. Et c'est
pour cela qu'il avait fait avoir a M. de Norpois le cordon de
Saint-Andre. Mais s'il eut du rendre compte a son gouvernement de
l'entretien qu'il avait eu apres cela avec M. de Norpois, il eut pu
enoncer dans sa depeche:
"J'ai compris que j'avais fait fausse route." Car des qu'il avait
recommence a parler Institut, M. de Norpois lui avait redit:
--J'aimerais cela beaucoup, beaucoup pour mes collegues. Ils doivent, je
pense, se sentir vraiment honores que vous ayez pense a eux. C'est une
candidature tout a fait interessante, un peu en dehors de nos habitudes.
Vous savez, l'Academie est tres routiniere, elle s'effraye de tout ce
qui rend un son un peu nouveau. Personnellement je l'en blame. Que de
fois il m'est arrive de le laisser entendre a mes collegues. Je ne sais
meme pas, Dieu me pardonne, si le mot d'encroutes n'est pas sorti une
fois de mes levres, avait-il ajoute avec un sourire scandalise, a
mi-voix, presque _a parte_, comme dans un effet de theatre et en jetant
sur le prince un coup d'oeil rapide et oblique de son oeil bleu, comme
un vieil acteur qui veut juger de son effet. Vous comprenez, prince, que
je ne voudrais pas laisser une personnalite aussi eminente que la votre
s'embarquer dans une partie perdue d'avance. Tant que les idees de mes
collegues resteront aussi arrierees, j'estime que la sagesse est de
s'abstenir. Croyez bien d'ailleurs que si je voyais jamais un esprit un
peu plus nouveau, un peu plus vivant, se dessiner dans ce college qui
tend a devenir une necropole, si j'escomptais une chance possible pour
vous, je serais le premier a vous en avertir.
"Le cordon de Saint-Andre est une erreur, pensa le prince; les
negociations n'ont pas fait un pas; ce n'est pas cela qu'il voulait. Je
n'ai pas mis la main sur la bonne clef."
C'etait un genre de raisonnement dont M. de Norpois, forme a la meme
ecole que le prince, eut ete capable. On peut railler la pedantesque
niaiserie avec laquelle les diplomates a la Norpois s'extasient devant
une parole officielle a peu pres insignifiante. Mais leur enfantillage a
sa contre-partie: les diplomates savent que, dans la balance qui assure
cet equilibre, europeen ou autre, qu'on appelle la paix, les bons
sentiments, les beaux discours, les supplications pesent fort peu; et
que le poids lourd, le vrai, les determinations, consiste en autre
chose, en la possibilite que l'adversaire a, s'il est assez fort, ou n'a
pas, de contenter, par moyen d'echa
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