essaires,
et je reviens a mes premiers entretiens avec lui.
II.
Le jour suivant, je lui demandai pourquoi, ayant une telle repugnance
pour le droit, il ne se livrait pas a l'etude de quelque autre science.
"Mon cher Monsieur, me dit-il avec une assurance qui n'etait pas de son
age, et qui semblait empruntee a l'experience d'un homme de quarante
ans, il n'y a aujourd'hui qu'une profession qui conduise a tout, c'est
celle d'avocat.
--Qu'est-ce donc que vous appelez _tout?_ lui demandai-je?
--Pour le moment, me repondit-il, la deputation est tout. Mais attendez
un peu, et nous verrons bien autre chose!
--Oui, vous comptez sur une nouvelle revolution? Mais si elle n'arrive
pas, comment vous arrangerez-vous pour etre depute? Vous avez donc de la
fortune?
--Non pas precisement; mais j'en aurai.
--A la bonne heure. En ce cas, il s'agit pour vous d'avoir votre
diplome, et vous n'aurez pas besoin d'exercer.
Je le croyais sincerement dans une position de fortune assez eminente
pour legitimer sa confiance. Il hesita quelques instants; puis, n'osant
me confirmer dans mon erreur, ni m'en tirer brusquement, il reprit: "Il
faut exercer pour etre connu... sans aucun doute, avant deux ans les
capacites seront admises a la candidature; il faut donc faire preuve de
capacite.
--Deux ans? cela me parait bien peu; d'ailleurs il vous faut bien le
double pour etre recu avocat et pour avoir fait vos preuves de capacite;
encore serez-vous loin de l'age...
--Est-ce que vous croyez que l'age ne sera pas abaisse comme le cens, a
la prochaine session, peut-etre?...
--Je ne le crois pas; mais enfin, c'est une question de temps, et je
crois qu'un peu plus tot ou un peu plus tard, vous arriverez, si vous en
avez la ferme resolution.
--N'est-il pas vrai, me dit-il avec un sourire de beatitude et un regard
etincelant de fierte, qu'il ne faut que cela dans le monde? Et que, de
si bas que l'on parte, on peut gravir aux sommites sociales, si l'on a
dans le sein une pensee d'avenir?
--Je n'en doute pas, lui repondis-je; le tout est de savoir si l'on
aura plus ou moins d'obstacles a renverser, et cela est le secret de la
Providence.
--Non, mon cher! s'ecria-t-il en passant familierement son bras sous le
mien; le tout est de savoir si l'on aura une volonte plus forte que
tous les obstacles; et cela, ajouta-t-il en frappant avec force sur son
thorax sonore, je l'ai!
Nous etions arrives, tout en causant, en face de la Cham
|