u me prendre pour son defenseur, s'ecria le petit
Paulier, qui n'etait guere plus gros qu'une mouche, elle n'aurait pas
ete battue deux fois. Mais enfin, puisque c'est le _president_ qu'elle a
honore de sa preference....
--Excusez! cela n'est pas vrai, repondit le president des bousingots
en elevant sa voix enrouee pour que tout le monde l'entendit. A moi,
Arsene, un verre de rhum! j'ai la gorge en feu. J'ai besoin de me
rafraichir.
Arsene vint lui verser du rhum, et resta debout pres de lui, le
regardant attentivement avec une expression indefinissable.
"Eh bien, mon pauvre Arsene, reprit Laraviniere sans lever les yeux
sur lui et tout en degustant son petit verre: tu ne verras plus ta
bourgeoise! Cela te fait plaisir peut-etre? Elle ne t'aimait guere, ta
bourgeoise?
--Je n'en sais rien, repondit Arsene de sa voix claire et ferme; mais ou
diable peut-elle etre?
--Je te dis qu'elle est partie. _Partie_, entends-tu bien? Cela veut
dire qu'elle est ou bon lui semble; qu'elle est partout excepte ici.
--Mais ne craignez-vous pas d'affliger ou d'offenser beaucoup le mari en
parlant si haut d'une pareille affaire? dis-je en jetant les yeux vers
la porte du fond, ou nous apparaissait ordinairement M. Poisson vingt
fois par heure.
--Le citoyen Poisson n'est pas ceans, repondit le bousingot Louvet: nous
venons de le rencontrer a l'entree de la Prefecture de police, ou il va
sans doute demander des informations. Ah! dame, il cherche; il cherchera
longtemps. Cherche, Poisson, cherche! Apporte!
--Pauvre bete! reprit un autre. Ca lui apprendra qu'on ne prend pas les
mouches avec du vinaigre. Arsene? a moi, du cafe!
--Elle a bien fait! dit un troisieme. Je ne l'aurais jamais crue capable
d'un pareil coup de tete, pourtant! Elle avait l'air use par le chagrin,
cette pauvre femme! A moi, Arsene, de la biere!"
Arsene servait lestement tout le monde, et il venait toujours se planter
derriere Laraviniere, comme s'il eut attendu quelque chose.
"Eh! qu'as-tu la a me regarder? lui dit Laraviniere, qui le voyait dans
la glace.
--J'attends pour vous verser un second petit verre, repondit
tranquillement Arsene.
--Joli garcon, va! dit le president en lui tendant son verre. Ton
coeur comprend le mien. Ah! si tu avais pu te poser ainsi en Hebe a la
barricade de la rue Montorgueil, l'annee passee, a pareille epoque!
J'avais une si abominable soif! Mais ce gamin-la ne songeait qu'a
descendre des gendarmes. Brave comme u
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