souvenirs des jours passes. En
route les Metis converserent avec le capitaine et lui firent de grands
eloges des petits soldats noirs (le 65eme), Ils arriverent aux Buttes de
la Paix le 4 de juin vers midi.
Quelques instants plus tard, Mgr Grandin, eveque d'Alberta, entrait au
Port. Les soldats saisirent leurs carabines a la hate et, sans prendre
le temps de faire aucune toilette, se mirent en rangs et presenterent
les armes. Puis mettant un genou en terre ils recurent la benediction du
prelat.
Pendant le court sejour de l'evoque a ce fort, il se passa une scene qui
ne devait pas s'effacer de sitot de l'esprit de tous ceux qui en ont ete
temoins. Un train de transports passait au Fort et, debout sur le perron
pour les benir, l'eveque leur souhaitait a chacun un heureux voyage.
Tout a coup un cri de surprise s'echappe de ses levres et, avant
qu'il put prononcer un seul mot, l'un des charretiers, un jeune homme
d'environ dix-neuf ans, etait a ses genoux et lui baisait les mains avec
tendresse. "Jean! mon Jean!" etaient les seuls mots qui sortaient des
levres du prelat, tandis que des larmes brillaient dans ses yeux. Quand
il fut quelque peu revenu de son emotion, il raconta aux soldats etonnes
le sujet de son trouble. Il y avait environ dix-huit a dix-neuf ans, une
pauvre sauvagesse mourait au milieu d'une tribu de Pieds-Noirs. Elle
laissait apres elle un tout jeune enfant, age de six mois a peine. Les
sauvages, embarrasses de cet etrange heritage, crurent ne pouvoir faire
mieux que d'enterrer le fils a cote de la mere. Ils jeterent donc
l'orphelin dans la fosse de sa malheureuse mere et couvrirent de terre
les deux corps. Un missionnaire, passant au camp le meme jour, apprit
la nouvelle de l'enterrement et courut a la tombe pour s'assurer si
l'enfant, etait encore en vie. Quelle ne fut pas sa surprise, apres
avoir decouvert les corps, de voir que le petit etre respirait encore!
Il le remporta avec lui et alla le placer a l'Orphelinat de St. Albert.
Monseigneur l'a toujours protege d'une maniere speciale et, apres lui
avoir fait donner une education suffisante, le laissa libre de se
choisir un etat quelconque. Un jour donc, l'orphelin partit, bien qu'a
regret, de l'asile ou il avait ete si bien traite et s'aventura dans les
bois et les prairies. Il y avait deja longtemps que l'orphelin etait
parti, et son protecteur le revoyait sain et sauf. Aussitot le recit
de cette etrange aventure termine, tous les soldats et les m
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