sans plus et qui se passionnent pour les crises de l'ame,
fussent-elles d'ailleurs singulieres.
Ces ideologies, au reste, sont exprimees avec une emotion communicative;
ceux qui partagent le vieux gout francais pour les dissertations
psychiques trouveront la un interet dramatique. J'ai fait de l'ideologie
passionnee. On a vu le roman historique, le roman des moeurs parisiennes;
pourquoi une generation degoutee de beaucoup de choses, de tout peut-etre,
hors de jouer avec des idees, n'essayerait-elle pas le roman de la
metaphysique?
Voici des memoires spirituels, des ejaculations aussi, comme ces livres
de discussions scolastiques que coupent d'ardentes prieres.
Ces monographies presentent un triple interet:
1 deg. Elles proposent a plusieurs les _formules_ precises de sentiments
qu'ils eprouvent eux aussi, mais dont ils ne prennent a eux seuls qu'une
conscience imparfaite;
2 deg. Elles sont un _renseignement_ sur un type de jeune homme deja
frequent et qui, je le pressens, va devenir plus nombreux encore parmi
ceux qui sont aujourd'hui au lycee. Ces livres, s'ils ne sont pas trop
delayes et trop forces par les imitateurs, seront consultes dans la
suite comme documents;
3 deg. Mais voici un troisieme point qui fait l'objet de ma sollicitude
toute speciale: ces monographies sont _un enseignement_. Quel que soit
le danger d'avouer des buts trop hauts, je laisserais le lecteur
s'egarer infiniment si je ne l'avouais. Jamais je ne me suis soustrait a
l'ambition qu'a exprimee un poete etranger: "_Toute grande poesie est un
enseignement, je veux que l'on me considere comme un maitre ou rien._"
Et, par la, j'appelle la discussion sur la theorie qui remplit ces
volumes, sur _le culte du Moi_. J'aurai ensuite a m'expliquer de mon
_Scepticisme_, comme ils disent.
* * * * *
I--CULTE DU MOI
a.--JUSTIFICATION DU CULTE DU MOI
M'etant propose de mettre en roman la conception que peuvent se faire de
l'univers les gens de notre epoque decides a penser par eux-memes et non
pas a repeter des formules prises au cabinet de lecture, j'ai cru devoir
commencer par une etude du Moi. Mes raisons, je les ai exposees dans une
conference de decembre 1890, au theatre d'application, et quoique cette
dissertation n'ait pas ete publiee, il me parait superflu de la
reprendre ici dans son detail. Notre morale, notre religion, notre
sentiment des nationalites sont choses ecroulees, constatais-je
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