r etait a bout. Il savait que la vie peut etre
delicieuse; il renonca rever avec elle au bois des citronniers de
l'amour et cela seul lui eut souri. Ses meditations familieres lui
faisaient horreur comme une plaine de glace deja rayee de ses patins.
Il bailla legerement, sourit de soi-meme, puis desira pleurer.
Du doigt, il traca sur la greve quelques rapides caracteres. La brise
qui rafraichissait son ame effaca ces traits legers.--
Cette legende est vraiment de celles qui sont ecrites sur le sable.
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Tout de son long etendu, les yeux fatigues par le couchant, seul et
lasse, il parut regarder en soi....
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CHAPITRE TROISIEME
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CONCORDANCE
_A vingt ans, il sentait comme a dix-huit, mais il etait etudiant et a
sa table d'hote (celle des officiers a cent francs par mois) mangeait
mieux qu'au lycee; en outre il pouvait s'isoler._
_L'usage de la solitude et une nourriture tonique augmenterent sa force
de reaction. Les elements divers qui etaient en lui: 1 deg. culture d'un
lyceen qui a passe son baccalaureat en 1880; 2 deg. experience du degout que
donnent a une ame fine la cuistrerie des maitres, la grossierete des
camarades, l'obscenite des distractions; 3 deg. desir et noblesse ideale,
aboutirent au reve._
_En frissonnant, il s'enfoncait dans cette facon de reve scolaire et
sentimental ou l'on retrouvera juxtaposees de confuses aspirations
idealistes, des tendresses sans emploi et de l'acrete._
_En verite, ceux qui se retournent avec ferveur vers des images
d'outre-tombe ne temoignent-ils pas qu'ils sont mecontents de leurs
contemporains, echauffes de quelque sentiment intime, inassouvi?_
* * * * *
DESINTERESSEMENT
Toujours triste, Amaryllis! les jeunes hommes t'auraient-ils delaissee,
tes fleurs seraient-elles fanees ou tes parfums evanouis? Atys, l'enfant
divin, te lasserait-il deja de ses vaines caresses? Amaryllis, souhaite
quelque objet, un dieu ou un bijou; souhaite tout, hors l'amour, ou je
suis desormais impuissant;--encore, que ne pourrait un sourire de celle
que cherit Aphrodite!
Ainsi Lucius raillait doucement Amaryllis, la tres jeune courtisane, aux
yeux et aux cheveux d'une clarte d'or, tandis que glissait la barque sur
le bleu canal, parmi les nenuphars bruissants. Tres bas sur leurs tetes,
les arbres en berceau
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