e la vierge, Amaryllis et
Lucius. Il etait poete et chancelant. Il affirma que la populace, un peu
egaree, se garderait de tous exces. Lucius et Athene empecherent
Amaryllis de lui dessiller les yeux: cette vierge ignorante de la vie et
ce debauche trop savant estimaient cruel et inutile de rompre l'harmonie
d'un esprit, et que les plus beaux caracteres sont faits du
developpement logique de leurs illusions.
* * * * *
Cependant, avec simplicite, Athene commenca son enseignement au petit
groupe attentif:
--"Je comptais sur vous, mes amis, car toujours il me sembla que les
poetes et les amis du plaisir, disposant, les uns du coeur des grandes
heroines, les autres du coeur des jeunes hommes et des jeunes femmes,
n'ont point a user de leur propre coeur pour les frivolites passageres,
et qu'ainsi, aux heures troublees, ils le trouvent intact dans leur
poitrine.
"Et puis les poetes et les voluptueux ne savent-ils pas se comporter
plus dignement qu'aucun envers la mort, car ceux-ci n'en parlent jamais,
et les hommes inspires la chantent en termes magnifiques, avec tout le
deploiement de langage qui convient aux choses sacrees.
"Elle est la felicite supreme, l'inconnue digne de nos meditations, la
patrie des reves et des melancolies. Elle est le seul, le vrai bonheur.
Quelques sueurs et des contractions la precedent qu'il faut couvrir d'un
voile, mais aussitot nous nous fondons dans l'Etre, nous sommes
soustraits aux douleurs du corps; plus d'angoisse, plus de desir, nous
nous absorbons dans l'un, dans le tout...."
* * * * *
Sa voix etait un peu cadencee et, par moments, s'envolait avec l'ampleur
d'un hymne aux dieux. Au milieu des huees d'un peuple, il y avait une
rare dignite dans cette vierge si jeune et belle, deployant, comme un
riche linceul, l'apotheose de la mort.
Elle vit le vieillard qui considerait la salle vide avec des yeux
touches de larmes, car ces nobles paroles le faisaient songer plus
amerement encore a cet abandon. Et s'interrompant:
* * * * *
"Je veux laisser la, dit-elle, les pensees des sages, puisque
aujourd'hui elles l'attristent, o mon poete! mais garde-toi de meler de
mauvaises pensees au regret des absents. Ce n'est pas sans doute faute
de courage qu'ils se refusent a braver la populace, mais songez, mes
amis, combien justement les hommes raisonnables pourraient vous traiter
d'insenses,
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