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r l'imagination d'Aurore. C'etait un pretendant respectueux, comme les meres en souhaitent a leurs filles, qui les revent plus effervescents. Une entrevue fut menagee, au Plessis, entre madame Dupin et le colonel. Celui-ci, avec sa chevelure d'argent, sa decoration et son air respectable, plut a la veuve qui, on le sait, avait toujours eu beaucoup de gout pour les militaires. Le fils lui etait moins sympathique. "Il n'est pas beau, disait-elle. J'aurais aime un beau gendre pour lui donner le bras." Cette ci-devant modiste, a l'ame de grisette, avait les memes instincts que la Grande-Duchesse de Gerolstein fredonnant a Fritz ces couplets qui portent la signature de deux academiciens: Voici le sabre de mon pere! Tu vas le mettre a ton cote! Ton bras est fort, ton ame est fiere, Ce glaive sera bien porte! Ou encore: Dites-lui qu'on l'a remarque, Distingue; Dites-lui qu'on le trouve aimable. Madame Dupin accepta en principe l'idee du mariage, exprima le desir qu'on arretat les conditions pecuniaires, quitta le Plessis en y laissant sa fille, puis elle revint au bout de quelques jours, toute bouleversee. Elle avait decouvert des choses monstrueuses: Casimir avait ete garcon de cafe! On rit, elle se facha, elle emmena Aurore a l'ecart, pour lui dire que dans cette maison on mariait les heritieres avec des aventuriers, moyennant pot-de-vin. C'etait la une calomnie gratuite a l'adresse des Roettiers, mais l'ecervelee avait vu clair dans le jeu de Casimir. Celui-ci, ferocement cupide--nous le decouvrirons plus tard--se souciait surtout et meme uniquement de faire un riche mariage. Aurore etait un beau parti; elle avait presque un demi-million, et il ne devait apporter, en fin de compte, apres avoir jete beaucoup de poudre aux yeux, qu'une soixantaine de mille francs. Comment madame Dupin se laissa-t-elle persuader? Elle recut la visite de madame Dudevant, qui la seduisit par une rare distinction mondaine et sut la flatter. Avec des eloges on trouvait aisement le chemin de son coeur et les avenues de sa pensee. Aurore elle-meme jugea charmante la belle-mere de Casimir. Le mariage fut decide, abandonne, repris. Madame Dupin ne pouvait accepter la perspective d'avoir "ce garcon de cafe" pour gendre. Son nez lui deplaisait. Elle allait si loin dans ses diatribes qu'elle produisit sur sa fille un effet contraire a ses desseins. Enfin elle exigea le regime dotal et qu'une rente annuelle de 3.000 francs fut
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