e nationale ou un adjoint de village. Sa robe violette, costume
si noble et si beau sur un homme pale et elance, ressemblait sur lui au
premier fourreau d'un gros marmot; sa ceinture de moire etait perdue sons
l'empietement du ventre sur la poitrine, et sa croix d'or, cherchant en
vain sa place entre un cou qui n'existait pas et un estomac qui n'existait
plus, occupait tout l'espace intermediaire entre le menton et l'ombilic."
Quelques autres pages attestent encore la forme litteraire qui sera celle
de George Sand. Ainsi la description des Landes, au chapitre 5 du tome II,
mais surtout la peinture du couvent des Augustines, dirige par madame de
Lancastre, et ou d'innombrables details proviennent du sejour d'Aurore a
la communaute des Anglaises. De l'intrigue meme de _Rose et Blanche_ il
n'y a rien a retenir. Horace et Laorens sont deux jeunes hommes sans grand
relief. L'un aime la comedienne Rose, qui devient religieuse. L'autre,
apres avoir commis envers Blanche, alors idiote, le pire mefait qui se
puisse imaginer, la retrouve le jour ou elle va prononcer ses voeux, fait
scandale dans la chapelle, la contraint au mariage et la voit mourir au
sortir de la benediction nuptiale. Ce n'est ni du roman psychologique, ni
du roman feuilleton qui tienne la curiosite en haleine. Aussi bien George
Sand discernait-elle nettement les defauts de son oeuvre: "Je suis fort
aise, ecrit-elle a sa mere le 22 fevrier 1832, que mon livre vous amuse.
Je me rends de tout mon coeur a vos critiques. Si vous trouvez la soeur
Olympie trop troupiere, c'est sa faute plus que la mienne. Je l'ai
beaucoup connue, et je vous assure que, malgre ses jurons, c'etait la
meilleure et la plus digne des femmes... En somme, je vous ai dit que je
n'avais pas fait cet ouvrage seule. Il y a beaucoup de farces que je
desapprouve: je ne les ai tolerees que pour satisfaire mon editeur, qui
voulait quelque chose d'un peu _egrillard_. Vous pouvez repondre cela pour
me justifier aux yeux de Caroline, si la verdeur des mots la scandalise.
Je n'aime pas non plus les polissonneries. Pas une seule ne se trouve dans
le livre que j'ecris maintenant et auquel je ne m'adjoindrai de mes
collaborateurs que le nom, le mien n'etant pas destine a entrer jamais
dans le commerce du bel esprit." En effet, lorsqu'elle rompt avec Jules
Sandeau cette courte association intellectuelle, elle garde de lui une
partie de son nom pour en faire George Sand. Desormais elle a trouve sa
voie, son
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