z, Madame, l'assurance de mon respect. Alfred de MUSSET."
Sand, quand tu l'ecrivais, ou donc l'avais-tu vue,
Cette scene terrible ou Noun, a demi-nue,
Sur le lit d'Indiana s'enivre avec Raymon?
Qui donc te la dictait, cette page brulante
Ou l'amour cherche en vain, d'une main palpitante,
Le fantome adore de son illusion?
En as-tu dans le coeur la triste experience?
Ce qu'eprouve Raymond, te le rappelais-tu?
Et tous ces sentiments d'une vague souffrance
Ces plaisirs sans bonheur, si pleins d'un vide immense,
As-tu reve cela, George, ou t'en souviens-tu?
N'est-ce pas le reel dans toute sa tristesse,
Que cette pauvre Noun, les yeux baignes de pleurs,
Versant a son ami le vin de sa maitresse,
Croyant que le bonheur, c'est une nuit d'ivresse,
Et que la volupte, c'est le parfum des fleurs?
Et cet etre divin, cette femme angelique,
Que dans l'air embaume Raymon voit voltiger,
Cette frele Indiana, dont la forme magique
Erre sur les miroirs comme un spectre leger,
O George! n'est-ce pas la pale fiancee
Dont l'Ange du desir est l'immortel amant?
N'est-ce pas l'Ideal, cette amour insensee
Qui sur tous les amours plane eternellement?
Ah! malheur a celui qui lui livre son ame,
Qui couvre de baisers sur le corps d'une femme
Le fantome d'une autre, et qui sur la beaute
Veut boire l'Ideal dans la realite!
Malheur a l'imprudent qui, lorsque Noun l'embrasse,
Peut penser autre chose, en entrant dans son lit,
Sinon que Noun est belle et que le temps qui passe
A compte sur ses doigts les heures de la nuit!
Demain viendra le jour; demain, desabusee,
Noun, la fidele Noun, par la douleur brisee,
Rejoindra sous les eaux l'ombre d'Ophelia;
Elle abandonnera celui qui la meprise,
Et le coeur orgueilleux qui ne l'a pas comprise
Aimera l'autre en vain,--n'est-ce pas, Lelia?
_Valentine_, qui parut trois mois apres _Indiana_, avait ete composee a
Nohant et achevee pendant les journees caniculaires de l'ete de 1832. Le 6
aout de cette annee, George Sand mandait a sa mere: "Je ne puis mieux
faire que de m'enfermer dans mon cabinet et de travailler a _Valentine_."
Ce second roman est d'une contexture superieure au premier. Les campagnes
du Berry ou il se deroule ont inspire fort heureusement l'ecrivain, a qui
elles etaient familieres. "Cette _Vallee Noire_, si inconnue, lisons-nous
dans la preface, ce paysage sans grandeur, sans eclat, qu'il faut chercher
pour le
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